Roses de Chine mais pas Rosa !

Claude Denninger

Le premier est un vrai rosier : un arbuste épineux, aux feuilles composées, de la famille des Rosacées. Le second est classé dans celle des Malvacées et forme un arbuste inerme aux feuilles simples. Mais l’un et l’autre proviennent effectivement de Chine. Intéressons-nous ici au genre Hibiscus.

Hibiscus rosa-sinensis © C. Denninger
Hibiscus rosa-sinensis ‘Lateritia’ © C. Denninger

Botanique

Les Hibiscus présentent une corolle très régulière, à cinq pétales bien séparés et rayonnants chez les formes sauvages et chez les variétés horticoles à fleurs simples, ainsi que de nombreuses étamines, à petite anthère globuleuse jaune, entourant le pistil ou partiellement transformées en pétales chez les variétés à fleurs plus ou moins doubles. Les filets des étamines sont soudés entre eux, sur presque toute leur longueur, formant ainsi un tube autour du style, qui est particulièrement long chez H. rosa-sinensis : 6 à 8 cm. Seules leurs extrémités se séparent pour porter les anthères un peu au-dessous des cinq stigmates, bien apparents, colorés et d’aspect velouté. Les pétales, rouges ou roses chez la forme sauvage, peuvent, dans le cas des variétés horticoles, aller du blanc pur au rouge violacé, en passant par toutes les nuances de jaune, de rose, de mauve, de rouge et d’orange. Au coeur de la fleur, la couleur peut être différente de celle du reste de la corolle et il existe des variétés nettement bicolores. Les fleurs sont de courte durée mais se renouvellent presque sans interruption pendant toute la saison de végétation. Le fruit sec est une capsule.

Hibiscus rosa-sinensis : une rose qui n’en est pas une

Le nom de cette rose de Chine, qui n’est pas une, est Hibiscus rosa-sinensis L. Ce nom, attribué par Linné, est souvent abrégé, par les horticulteurs, en Hibiscus sinensis ou simplement en Hibiscus, surtout pour les sujets commercialisés aujourd’hui comme plantes d’appartement. Or, le genre Hibiscus comprend environ 150 espèces différentes, sans compter les variétés.

Originaire du sud de la Chine, H. rosa-sinensis a longtemps été réservée à l’ornementation des jardins en climat tropical ou subtropical. En France, elle ne supporte l’hiver, en plein air, que sur les sites les plus abrités de la Côte d’Azur et ne fleurit qu’en été, à condition de ne pas manquer d’eau. En revanche, en climat tropical, elle forme un grand arbuste, très ramifié, d’une hauteur de 2 à 4 mètres, à feuilles simples et brillantes, qui fleurit sans interruption pendant toute l’année. Ses fleurs ne durent qu’une journée, parfois deux ou trois, mais de nouveaux boutons s’épanouissent chaque jour. Elle orne presque tous les jardins de la zone tropicale. Certaines variétés s’adaptent même à des climats moins chauds, de type méditerranéen, où il ne gèle pas, et à condition de pouvoir les arroser en saison sèche. Ainsi peut-on en voir de beaux sujets florifères dans les pays du sud de la Méditerranée, en Californie ou en Afrique du Sud. Les plus riches collections seraient en Australie. Il en existe tout de même environ 5 000, avec des fleurs de 8 à 15 cm de diamètre.

Hibiscus syriacus ‘ Oiseau Bleu ‘. © C. Denninger
Hibiscus moscheutos © C. Denninger

Les Hibiscus sous nos latitudes

Sous nos climats, l’Hibiscus rosa-sinensis doit être traité comme une plante de serre ou d’appartement. En serre tempérée ou chaude, il peut fleurir toute l’année s’il dispose de suf-fisamment de lumière en hiver. Les plantes en pots ne sont pas toujours faciles à conserver en bon état pendant la mauvaise saison, surtout par manque de lumière, sauf si on possède une véranda. En été, elles se trouvent souvent mieux à l’extérieur. Elles produisent alors de nombreuses fleurs, à condition de les arroser presque quotidiennement et, environ deux fois par mois, avec une solution nutritive1.

Si elles ont mal supporté l’hiver et perdu une partie de leur feuillage, il ne faut pas craindre de les tailler sévèrement. De nouveaux rameaux se développent ensuite et cela évite qu’elles ne deviennent trop encombrantes. Il convient de les rempoter chaque année, au printemps, dans un pot ou un bac d’un plus grand volume, en complétant avec un bon terreau. Il est d’ailleurs utile de rempoter aussi les plants que l’on vient d’acheter en pots car ceux-ci sont toujours d’un volume trop faible pour permettre un bon développement et une bonne floraison, même au cours de la première année.

Cette rose de Chine peut être multipliée par bouturage de rameaux lignifiés, entre avril et août, dans un mélange, à volume égal, de tourbe et de sable. Cela permet de conserver plus longtemps, en les renouvelant, des variétés rares.

1 Un engrais liquide portant la mention normalisée « solution NPK » 4-5-6 avec oligoéléments, pour plantes d’appartement, convient parfaitement, en respectant évidemment la dose d’emploi préconisée.
Étamines et pistil d’Hibiscus rosa-sinensis ‘Lateritia’. © C. Denninger
Hibiscus rosa-sinensis © C. Denninger

Les Hibiscus rustiques

Ce ne sont pas des « roses de Chine » mais ils produisent aussi de très belles fleurs. Ainsi, l’Hibiscus syriacus, la ketmie des jardins, parfaitement rustique en toutes régions, est certainement le meilleur de nos arbustes à floraison estivale. Largement planté dans nos jardins et nos espaces verts, peu exigeant, il est plus souvent désigné sous le nom d’althea, abréviation de son ancien nom botanique Althea frutex. Or, le genre Althea ne doit maintenant s’appliquer qu’à quelques Malvacées herbacées. Malgré son nom, il n’est pas spontané en Syrie. Il a peut-être été introduit en Europe depuis ce pays mais il est probablement, lui aussi, originaire de Chine.

De toute façon, c’est un excellent arbuste, à feuilles caduques, fleurissant abondamment de fin juillet à mi-septembre. Il peut atteindre deux mètres de hauteur et de largeur s’il croît librement. Comme il tolère parfaitement des tailles sévères, il est aisé de le maintenir dans des dimensions plus réduites et de lui donner certaines formes, en pyramide notamment. Ces tailles doivent alors être annuelles et effectuées en hiver.

Il existe des variétés horticoles à fleurs simples, à fleurs doubles, de différentes couleurs : blanches, roses, rouges, mauves et bleues, souvent avec un coeur pourpre. Et, là aussi, les fleurs simples sont les plus belles. Parmi celles-ci, citons les variétés ‘Diana’ (blanc pur) ‘Red Heart’ (blanche à coeur pourpre), ‘Pink Giant’, ‘Wood bridge’ (roses) et, surtout, ‘Oiseau Bleu’ à grandes fleurs de forme parfaite, d’un admirable bleu ciel. Associée aux rosiers, cette dernière variété apporte, en été, le vrai bleu qui manque encore chez les roses.

L’Hibiscus moscheutos (synonyme : Hibiscus palustris) n’est pas un arbuste mais une grande plante vivace, dont la souche produit chaque année de longues et fortes tiges atteignant une hauteur de 1 mètre à 1,70 mètre. Il est originaire du sud-est des États-Unis, où il croît dans des sites marécageux, d’où son second nom. Dans nos jardins, il exige donc un sol profond et humide, au moins une terre maintenue fraîche en été. Moins rustique que l’espèce précédente, à réserver plutôt au Midi, il est prudent d’abriter sa souche dans les régions où de fortes gelées sont à craindre.

Cette espèce surprend toujours par la dimension impressionnante de ses fleurs, aux corolles largement épanouies, apparaissant de juillet à septembre, sur de courts pédoncules. Leur diamètre est rarement inférieur à 13 cm et il peut atteindre 20 cm chez certaines variétés. Ces fleurs sont blanches, roses ou rouges mais jamais bleues.

Enfin, malgré leur indéniable beauté, les fleurs de ces hibiscus rustiques n’égalent pas vraiment celle des roses de Chine.

À LIRE

Denninger C. 2017. Les Roses de Chine, Lyon Horticole n° 695 7-10