Les traditions culinaires de Noël

Jean-François CoffinMichel Pitrat

Le cardon, légume lyonnais de Noël

Jean-François Coffin

 

Légume traditionnel des repas de Noël des familles purement lyonnaises, le cardon fait aussi le bonheur de celles des régions bordant la capitale des Gaules.

Le cardon est un légume proche de l’artichaut - © L.Bouvier - Adobe stock
Le cardon est un légume proche de l’artichaut – © L.Bouvier – Adobe stock

Le cardon (Cynara cardunculus, famille des Astéracées) peut être confondu avec l’artichaut. Mais une dif­férence permet de les distinguer : ses feuilles sont munies d’épines et l’on consomme les cardes, c’est-à-dire les pétioles des feuilles, alors que, s’agissant de l’artichaut, on déguste le réceptacle floral.

Rustique, le cardon aime cependant les terres riches en humus. Le semis se réalise au printemps. Comme il doit se déguster « blanchi » (c’est-à-dire blanc, sans trace de chlorophylle), dès le mois de septembre on peut observer, dans les jardins, les cardons entourés de manchons de carton ou de papier. L’objectif est d’arrêter les rayons du soleil et donc le verdissement des feuilles.

S’inspirer de Paul Bocuse pour cuisiner le cardon

La préparation du cardon est tout un art. Il faut d’abord l’éplucher, enlever les fils (comme les bettes), ne pas se blesser avec les éventuelles épines. Heureusement, il existe des variétés sans épines. Sinon, lors de l’achat, demandez à votre maraîcher de les enlever, comme le fait Josette, une Lyonnaise de souche que nous avons interrogée. Elle conseille de mettre des gants car le cardon noircit les mains. Nous espérions qu’elle nous dévoile ses petits secrets quant à la préparation mais elle les a gardés. Elle nous a seulement signalé qu’elle s’inspirait de la recette de Paul Bocuse, le spécialiste de ce plat de fête.

Pour faire simple, la cuisson se fait d’abord à l’eau. Puis au four après avoir recouvert le légume de moelle préalablement cuite, d’une béchamel et de fromage râpé. La viande qu’accompagne le cardon peut être un rôti de veau, de bœuf, un poulet, voire du sanglier !

Sur Internet, vous trouverez de multiples recettes qui tirent en grande partie leur inspiration du chef Paul Bocuse.

Les treize desserts

Michel Pitrat

Outre les végétaux décoratifs (ou ornementaux) de Noël, certains fruits et légumes sont consommés préférentiellement à cette période de l’année. En Provence, le repas traditionnel de Noël a lieu le 24 décembre. Il s’agit d’un repas maigre qui se termine par treize desserts, chiffre symbolique rappelant la Cène avec le Christ et les douze apôtres.

Ces desserts comprennent généralement des fruits secs (amandes, noix, noisettes, figues sèches, raisins secs), des fruits frais (raisins, pommes, poires, melons d’hiver, mandarines, dattes), du nougat blanc et du nougat noir, la fougasse ou la pompe à l’huile (sorte de brioche plate parfumée à la fleur d’oranger), de la pâte de coings. Du vin cuit ou de la carthagène (moût de raisin auquel on ajoute de l’alcool de marc) accompagnent le tout.

Table calendale © B. Piccoli Adobe stock
Table calendale © B. Piccoli Adobe stock

 Des variantes locales et familiales importantes permettent d’inclure des prunes séchées (pistoles), des calissons, diverses confitures, pâtes de fruits et fruits confits, des oreillettes ou de la panade (tarte de pâte briochée avec une compote de pommes).

Il s’agit donc de produits du terroir, sauf les dattes et éventuel­lement les mandarines ou les oranges. Issus du jardin ou confectionnés assez facilement, ces desserts demeurent très simples.

Le blé de la Sainte-Barbe

Michel Pitrat

Les crèches d’église en Provence et en Italie remontent au Moyen Âge. On attribue leur invention à Saint François d’Assise (1182-1226). À la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, se développent les crèches familiales. Les crèches sont alors généralement décorées avec des soucoupes dans lesquelles on a mis à germer, sur du coton imbibé d’eau, du blé ou des lentilles pour la Sainte-Barbe (Barbara, le 4 décembre). Cette « verdure » pendant l’hiver constitue un présage du printemps et une promesse pour les récoltes futures. Cette tradition très ancienne correspond aux « jardins d’Adonis » des pays méditerranéens, avec un décalage des saisons. Adonis, beau mortel aimé de Vénus-Aphrodite, incarne un symbole de la Nature avec ses cycles. Au cœur de l’été, mauvaise saison pour la végétation avec les excès de chaleur et de sécheresse, des terrines de plantes vertes ou de fleurs ornaient les maisons de l’Asie mineure en faisant espérer la fin de la canicule. Dans nos pays, c’est le froid de l’hiver qui est considéré comme la mauvaise saison, et le blé ou les lentilles de la crèche anticipent le cycle des saisons.

Aujourd’hui, les maisons étant plus chauffées qu’au XIXe siècle, les enfants peuvent préparer ces semis quelques jours après la Sainte-Barbe et les mettre dans une pièce bien éclairée. Les plantules ne seront pas trop étiolées pour Noël.

Statue de Saint-François d’Assise dans l’église de Feucherolles (78) - © Pierre Poschadel - WikiCommons
Statue de Saint-François d’Assise dans l’église de Feucherolles (78) – © Pierre Poschadel – WikiCommons