La mouche Bactrocera dorsalis : Un nouveau ravageur sur fruits et légumes

Bactrocera dorsalis est une mouche des fruits originaire d’Asie, fortement nuisible pour les cultures fruitières et légumières. Encore absente de la France métropolitaine sur les parcelles cultivées, elle est présente et cause des dégâts importants en Outre-Mer (Île de la Réunion). La menace est sérieuse.

Origine de Bactrocera dorsalis

Originaire d’Asie, B. dorsalis est aujourd’hui présente dans 65 pays en Amérique, en Afrique et en Océanie. On la trouve notamment en Indonésie, en Inde, en Chine, dans de nombreux pays d’Afrique (Cameroun, Ghana, Gabon, Kenya, RDC…), à Hawaï et dans les Mascareignes (Réunion, Maurice, Madagascar). Elle est régulièrement piégée aux États-Unis, en Floride et en Californie, où des programmes d’éradication et de quarantaine sont déclenchés pour éviter son installation. Il s’agit d’une espèce tropicale préférant les climats chauds et humides. Cependant, des projections climatiques ont montré qu’elle pourrait s’établir autour du bassin méditerranéen, au sud de l’Europe. Absente de l’hémisphère Nord jusqu’en 2018, des piégeages en Italie, en Autriche et en France ont mis en évidence sa présence. Ainsi, à l’été 2019, des adultes ont été identifiés par piégeage à proximité de Montpellier. Aucun dégât dû à Bactrocera dorsalis n’a cependant été observé sur fruits ou légumes, et aucune larve n’a été détectée à proximité du lieu de piégeage. De même, des pièges ont capturé des adultes à proximité du marché de Rungis en 2019. Le risque le plus élevé d’introduction résulte de l’importation de végétaux infestés par B. dorsalis (présence d’oeufs ou de larves) provenant de pays où cette mouche est présente. Sur la période 2013-2018, B. dorsalis a été interceptée plus de 200 fois en France, sur des fruits et légumes provenant de 17 pays (données LSV-Anses). Une fois introduite dans une nouvelle localité, elle est capable de se propager très loin et très vite. Le risque d’introduction est important, d’autant plus lors d’échanges commerciaux de fruits et légumes avec des pays où cette mouche est présente.

Dégâts dus à Bactrocera dorsalis sur mangue © S. Cadet, Chambre d’Agriculture La Réunion
Dégâts dus à Bactrocera dorsalis sur mangue © S. Cadet, Chambre d’Agriculture La Réunion

Des dégâts liés aux larves

Cette espèce est fortement invasive. En plus d’une forte capacité de dispersion, elle présente une fécondité élevée (jusqu’à 1 500 oeufs par femelle) et un cycle biologique relativement court en période favorable (seize jours en conditions estivales) (voir encadré en page suivante). C’est une espèce extrêmement polyphage, avec plus de 400 hôtes identifiés sauvages et cultivés. Les cultures sensibles sous nos latitudes sont la pêche, la pomme, la prune, la cerise, la tomate, l’aubergine, le concombre, le poivron, le potiron, la courge. Elle est également présente dans les zones semi-naturelles comme les haies.

Bactrocera dorsalis femelle © Antoine Franck (Cirad)

Les larves se développent à l’intérieur des fruits et des légumes. Les femelles pondent préférentiellement dans les organes mûrs, mais des pontes peuvent être observées sur des organes en cours de maturation. Les fruits et légumes stockés et ceux tombés au sol constituent aussi des sources de pontes. La femelle insère un oeuf sous la peau du fruit ou légume. La larve va éclore et se nourrir de la pulpe, occasionnant un affaiblissement des tissus, leur pourrissement et des coulures. Les fruits chutent prématurément et ne sont plus commercialisables. On observe en général plusieurs pontes par fruit, et les attaques peuvent être très fortes avec plusieurs dizaines de trous de ponte.

Dégâts sur tomate © R. Fontaine, FDGDON La Réunion

Comment reconnaître la mouche ?

Bactrocera dorsalis, la mouche orientale des fruits, appartient à l’ordre Diptera, famille des Tephritidae. L’adulte est légèrement plus gros qu’une mouche domestique et mesure 8 à 10 mm de long. La larve ne possède pas de pattes, elle présente l’aspect typique de l’asticot, avec une forme cylindrique et allongée, de couleur blanc crème. Une fois mature, elle émerge du fruit et tombe au sol pour former une pupe (dernier stade larvaire), de couleur brun roux à brun foncé (cf. page 58).

Bactrocera dorsalis sur tomate verte © R. Fontaine, FDGDON La Réunion

Comment maîtriser cette mouche polyphage ?

Trois méthodes existent pour maîtriser cette mouche : la prophylaxie, la protection physique et la suppression des mâles. Pour la prophylaxie, il s’agit de récolter les fruits tombés au sol, qui constituent une source de ponte et contiennent des larves en cours de développement. En conditions favorables, il ne faut que sept jours à la larve pour accomplir son cycle et sortir du fruit pour se nymphoser dans le sol.
La protection physique consiste en l’utilisation de filets sur l’arbre ou sur la culture entière ou de manchons pour protéger directement les fruits. Elle a fonctionné avec succès en Asie. La maille doit être inférieure à 2 mm.
La suppression des mâles utilise le méthyleugénol, qui a un fort pouvoir attractif sur les individus mâles. Associé à un insecticide, cette méthode type « attirer et tuer » permet de réduire de façon significative la population des individus mâles et ainsi de limiter la reproduction et les dégâts causés par les femelles (pontes).

 

 

Yves Lespinasse
Ancien directeur de recherche Inrae, membre du comité de rédaction de Jardins de France, d’après la note de synthèse du CTIFL – Sept. 2020

POUR EN SAVOIR PLUS

Gard B, Février F, Villeneuve F, Zavagli F. Bactrocera dorsalis. Note de synthèse – Cahier Environnement Sécurité. 2020 ; 13p. https://www.ctifl.fr/Pages/Kiosque/DetailsOuvrage. aspx?idouvrage=4049
Contact : Benjamin Gard – benjamin.gard@ctifl.fr
http://daaf.reunion.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/Pages_de_Fiche_Bactrocera_dorsalis_5mai-2-3_cle8cffba.pdf
http://entnemdept.ufl.edu/creatures/fruit/tropical/oriental_fruit_fly.htm

NE PAS LA CONFONDRE AVEC D’AUTRES MOUCHES DES FRUITS

De manière générale, il est difficile de différencier B. dorsalis des autres mouches des fruits à l’état larvaire. La détermination se fait à partir des individus adultes.

La mouche de l’olive, Bactrocera oleae
Cette mouche ne parasite que les oliviers. Elle est plus petite que B. dorsalis.

© Alvesgaspar – CC BY-SA 3.0

 

La mouche méditerranéenne des fruits Ceratitis capitata
Les adultes de C. capitata sont plus petits que les adultes de B.dorsalis.

© J. Segreto – CC BY 2.0

 

La mouche de la cerise Rhagoletis ceras
Cette mouche ne s’attaque qu’au cerisier. Les adultes de R. cerasi sont plus petits que les adultes de B. dorsalis.

Hectonichus – CC by 4.0

 

La drosophile à ailes tachetées, Drosophila suzukii
Les adultes de D. suzukii sont nettement plus petits que les adultes de B. dorsalis.

© J. Gallagher – Flickr