Un notaire et un prêtre à l’origine des jardins ouvriers et familiaux

Daniel Lejeune

Deux personnages sont à l’origine des jardins ouvriers et familiaux. Un notaire, Hugues Renaudin, fonda les jardins ouvriers en 1900 tandis que l’Abbé Lemire avait créé en 1896 la Ligue du coin de terre et du Foyer. Deux initiatives qui se retrouvent aujourd’hui dans la Fédération des jardins Familiaux et collectifs.

 

« Le monde de l'horticulture déplorera profondément la mort du grand homme de bien que fut M. Renaudin. Parmi les nombreuses œuvres philanthropiques fondées par le regretté notaire de Sceaux, celle des jardins ouvriers était la plus connue et celle peut-être dont la portée était la plus grande. En propageant le goût de l'horticulture dans les classes laborieuses, M. Renaudin y voyait un puissant moyen de les rattacher à la vie simple et saine, de resserrer les liens de la famille et d'augmenter le bien-être général » « Lorsqu'il fonda cette œuvre, en 1900, il eut la bonne fortune de rencontrer pour le seconder un directeur technique de premier ordre. Ancien maraîcher retiré des affaires, disposant de son temps et toujours prêt à le consacrer à d'utiles propagandes, M. Curé fut pour M. Renaudin le collaborateur rêvé, d'un dévouement et d'une activité inlassables, dirigeant les installations et prodiguant aux apprentis jardiniers tous les renseignements nécessaires pour leur éviter l'écueil des déceptions.» Ainsi s'exprimait en février 1914, G.T. Grignan, secrétaire-rédacteur de la Revue Horticole. Il ajoutait que M. Renaudin fit ensuite construire des maisons, qu'il offrit comme récompenses aux meilleurs jardiniers, avec jouissance durant leur vie entière. Il précisait aussi que l'Œuvre des jardins ouvriers se doublait de dispositions sociales en matière d'enseignement post-scolaire et de secours mutuel. C'étaient en quelque sorte les jardins du phalanstère... sans toutefois le phalanstère lui-même ! Renaudin n'avait-il pas reçu à l'exposition internationale de Saint-Louis (USA), le premier prix de philanthropie pour ses travaux ?

 

L'abbé Jules Lemire - © http://memoire-abbe-lemire.monsite-orange.fr/

L'abbé Jules Lemire - © http://memoire-abbe-lemire.monsite-orange.fr

L’abbé Lemire proche des classes populaires

Tout différent est le parcours de l'abbé Jules-Auguste Lemire. D’origine rurale modeste, prêtre en 1878, l'abbé Lemire est nommé à Hazebrouck, une petite ville où l'on parle un flamand qu'il ne connaît pas. D'abord partisan du Comte de Chambord, il s'engage politiquement mais aspire à une réconciliation de l'église et des classes populaires et reconnaît, avec le cardinal Lavigerie, la IIIe République naissante. Il est élu député en 1893 et 1898 et accepte la loi de séparation de l'église et de l'Etat. Malgré l'interdiction de sa hiérarchie, il est réélu en 1910 et 1914 (grâce aux voix des républicains). A cette date, il devient en outre maire d'Hazebrouck. C'est lui qui fonda en 1896 la Ligue du coin de terre et du Foyer. Les deux hommes se connaissaient et l'abbé Lemire a eu l'occasion de visiter les réalisations de Renaudin à Sceaux. Ces deux initiatives se retrouvent aujourd’hui dans la Fédération des jardins Familiaux et collectifs. L'abbé Lemire et le notaire Renaudin ont bien mérité d'entrer au panthéon des jardiniers !