Tournesol et autres Helianthus

Le genre Helianthus comprend environ 70 espèces d’origine américaine, la grande majorité venant d’Amérique du Nord. Ce sont des plantes herbacées pouvant atteindre une grande taille (3 à 4 mètres). Annuelles ou pérennes, elles se multiplient par graines ou végétativement par les rhizomes. Ce genre est l’une des rares plantes alimentaires originaires d’Amérique du Nord.

Le tournesol : une ancienne culture et de nombreuses utilisations

Le tournesol, H. annuus, était déjà cultivé au Mexique et dans le sud-est des États-Unis vers 2500 av. J.C. Après son introduction en Europe, il a été très cultivé et amélioré en Russie et en Ukraine. Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, la teneur des graines en huile a ainsi été augmentée, pour passer de 20 à 40 %. Aujourd’hui encore, la Russie et l’Ukraine assurent environ la moitié de la production mondiale. L’huile de tournesol est de bonne qualité alimentaire. Elle contient essentiellement des acides gras non saturés. Dans les dernières décennies, une mutation donnant une teneur très élevée en acide oléique (80 %) a été introduite dans les variétés cultivées. Ces variétés de « tournesol oléique » sont aujourd’hui majoritaires en France. Le tourteau obtenu après extraction de l’huile est intéressant pour l’alimentation animale à cause de sa teneur élevée en méthionine (un acide aminé essentiel).

Les graines sont également consommées décortiquées en accompagnement dans des salades ou des müeslis. Les graines grillées et légèrement salées sont connues sous le nom de pipas en Espagne et grignotées dans de nombreux pays méditerranéens

Le tournesol est aussi une espèce ornementale : avec plus de 550000 hectares cultivés, il participe largement au fleurissement de la France ! Dans les jardins, on préfère généralement les formes ramifiées avec plusieurs capitules qui assurent une plus longue floraison. Les couleurs varient du jaune au rouge ou au brun. Il existe des variétés à « fleurs » simples ou doubles, ainsi que des variétés sans pollen, plus particulièrement destinées à la production de fleurs coupées. Des variétés naines sont également disponibles, en particulier pour faire des potées fleuries (1*). Lors de la floraison, de nombreux insectes, dont des abeilles et des bourdons, visitent les fleurs. Les oiseaux sont très attirés par les graines et les mésanges ou les chardonnerets viennent régulièrement piller les capitules.

 

Tournesol et géométrie

La disposition des fleurs (et des graines) sur le capitule n’est pas du tout aléatoire mais se fait suivant des spirales, avec environ 34 spirales dans le sens des aiguilles d’une montre et 55 dans l’autre sens, respectivement 55 et 89 dans des capitules de plus grande taille ou 89 et 144 dans les très grands capitules. Ces nombres font partie de la suite des nombres de Fibonacci et le rapport du nombre de ces spirales dans un sens et dans l’autre est égal au nombre d’or : 55/34 = 89/55=144/89=1,62. Cette disposition est optimale pour avoir le plus grand nombre de graines de même taille sur une surface donnée.

 

Le tournesol tourne-t-il vers le soleil ?

Oui et non. Les jeunes fleurs de tournesol suivent le mouvement du soleil (héliotropisme). Elles sont orientées vers l’est le matin et vers l’ouest le soir, tournant par anticipation pendant la nuit pour se retrouver face à l’est le matin. Mais les fleurs adultes (à partir de la floraison) ne tournent plus et sont orientées vers l’est ou le sud-est toute la journée !

La teinture de tournesol est un indicateur coloré virant au rouge ou au bleu suivant que le milieu est acide ou basique. Elle est obtenue traditionnellement à partir d’une Euphorbiacée, le croton des teinturiers (Chrozophora tinctoria) que l’on trouve à l’état sauvage dans le sud-est de la France, ou maintenant plus fréquemment à partir de divers lichens.

 

Au sujet du topinambour

Le topinambour (H. tuberosus) était largement cultivé par les Amérindiens de l’est des États-Unis et du Canada actuels avant l’arrivée des colons européens. Le nom de topinambour viendrait d’une confusion avec une tribu du Brésil, les Tupinambas dont des membres étaient présents en Europe lors de l’introduction et du développement de la culture de cette plante.

Le topinambour a été cultivé comme plante vivrière, puis détrôné par la pomme de terre au XIXe siècle. Il a fait une résurgence pendant la Deuxième Guerre mondiale car, comme le rutabaga, il n’était pas l’objet de réquisition par les armées occupantes, à l’inverse de la pomme de terre. Il a ainsi pu laisser de mauvais souvenirs, surtout s’il est consommé simplement bouilli. Cependant, bien accommodé, c’est un bon légume et il refait son apparition dans le cadre de la diversification. Ce sont les rhizomes charnus blancs, jaunes, rosés jusqu’à violet-pourpre qui sont consommés. Leur forme varie de presque ronde à plus ou moins allongée suivant les variétés. Les rhizomes ne sont pas sensibles au froid et peuvent rester en terre en hiver. Ils ne seront arrachés qu’au fur et à mesure des besoins car ils flétrissent assez rapidement à l’air libre.

Inutile de chercher des graines de topinambour, il suffit de mettre en terre un rhizome. Plusieurs variétés existent comme le ‘Violet de Rennes’ ou le ‘Rouge du Limousin’. Cette espèce à multiplication végétative peut parfois devenir plus ou moins envahissante car tout rhizome resté en terre repoussera l’année suivante.

 

Autres espèces d’Helianthus

L’helianthi (H. strumosus) est une autre espèce à multiplication végétative. On consomme les rhizomes, qui sont généralement plus fusiformes et plus allongés que ceux du topinambour, dont ils ont une saveur voisine. L’helianthi est également cultivé comme plante ornementale pour ses fleurs jaunes à légèrement orangé. Comme chez la plupart des Asteraceae, les racines de topinambour ou d’helianthi sont riches en inuline (un polymère de fructose) (2*).

Parmi les autres espèces parfois cultivées comme ornementales on peut trouver des espèces annuelles (H. petiolaris) ou pérennes : H. maximiliani, H. decapetalus, H. multiflorus, H. salicifolius à feuilles de saule, Pappobolus microphyllus (syn. H. microcephalus). Les fleurs sont de couleur jaune citron à jaune orangé.

LA BARDANE

Une autre racine a été consommée et cultivée dans les jardins : la bardane (Arctium lappa). La plante, présente en Eurasie à l’état sauvage, est largement répandue en France au bord des chemins et dans des sols riches en azote au voisinage des habitations. Le fruit est recouvert de petits crochets qui facilitent sa dissémination par les animaux et auraient inspiré l’invention du velcro. Les racines noires peuvent être très longues (jusqu’à 80-100 cm). Si elle a disparu aujourd’hui de notre alimentation, elle est encore consommée en Extrême-Orient, par exemple au Japon sous le nom de Gobo.

© Christian Fischer –Wikimedia Commons

Michel Pitrat
Directeur de recherche honoraire de l’Inra, membre du comité de
rédaction de Jardins de France

 

(1*) Voir par exemple les catalogues de Ducrettet (www.ducrettet.com/graineterie-produits/241/graines-de-fleurs-annuelles-soleilou helianthus) ou de Voltz (www.graines-voltz.com/_catal/pdf/ semences_florales_2017_2019.pdf)
(2*) Voir, dans ce dossier, l’encadré sur la chicorée industrielle, p. 37.