Tambourins et galoubets : fondements du folklore provençal

Tambourins et galoubets sont liés à la Provence, grâce à Frédéric Mistral qui en a fait les symboles de la région, à la fin du XIXe siècle. Presque entièrement végétaux, leur fabrication reste artisanale et traditionnelle. Découverte.

Les premières utilisations avérées du tambourin et du galoubet remontent à la période médiévale, où on les trouve partout en Europe dans toutes les couches de la population et notamment chez les troubadours. Ce couple d’instruments reste dominant jusqu’à la fin de la Renaissance puis disparaît. Il réapparaît au XVIIe siècle, période à laquelle il prend une vraie place dans le monde de la musique.

Si nous associons inconsciemment tambourins, galoubet et Provence c’est grâce à Frédéric Mistral, qui à la fin du XIXe siècle, a fait de ces instruments les symboles de la culture provençale qu’il réhabilitait avec ses amis poètes et écrivains membres du Félibrige, ce mouvement qu’il a créé en 1854 pour promouvoir et codifier la langue provençale et plus généralement la culture provençale.

Ainsi, Frédéric Mistral encourageait-il les sociétés de tambourinaires à animer les bals de villages pour que les instruments traditionnels ne disparaissent pas au profit des fanfares. Le tambourinaire est un musicien qui joue simultanément du galoubet et du tambourin.

Le tambourin, presque intégralement végétal

Le tambourin, tambourin catalan ou tambourin provençal, est un instrument à percussion, de la famille des tambours. C’est un instrument à bourdon (son continu) dont le timbre est assez grave et la résonance longue.

Il n’est joué qu’avec une main, à l’aide d’une massette en bois dont l’extrémité, appelée gland, est en ivoire.

Si nous associons inconsciemment tambourins, galoubet et Provence c’est grâce à Frédéric Mistral (ici, sa statue, à Avignon), qui a fait de ces instruments les symboles de la culture provençale qu’il réhabilitait © Januszk57 CC BY 4.0

De l’autre main, le tambourinaire joue du galoubet. Traditionnellement, le tambourin est fabriqué en bois massif, le plus souvent en tilleul ou en noyer. Il est sculpté de différents décors tels que des baguettes, des rameaux d’olivier, des rosaces, des blasons…

Les planches de 5 mm d’épaisseur et 15-20 cm de large qui servent à la fabrication des tambourins sont d’abord sculptées puis cintrées. Le tambourin mesure 35 à 40 cm de diamètre et 75 à 80 cm de haut. Il est pourvu d’une peau à chaque extrémité, fixée par un cercle de bois (hêtre, frêne, châtaignier).

Un deuxième cercle de bois, superposé, permet de fixer les cordes qui relient les deux peaux, et de les tendre. Ces cordes sont en chanvre de différentes épaisseurs. La chanterelle est une corde particulière (timbre) placée sur la peau de frappe. Elle est très fine, réalisée en chanvre ou en boyau. Ainsi, à part les peaux, et quelquefois la chanterelle, les différentes parties constituant le tambourin sont issues de végétaux.

Le galoubet

Le galoubet est une flûte à bec pourvue de trois trous. Il est fait de bois dur tels que l’ébène (Diospyros et Dalbergia), le palissandre (Dalbergia nigra), la grenadille (Dalbergia melanoxylon) ou le buis. Certains musiciens préfèrent les galoubets en bois d’arbres fruitiers comme l’olivier, l’amandier, l’arbousier et même le prunier ou le grenadier. Certains galoubets sont bagués d’os ou d’ivoire. Chacun a sa propre tonalité, du aigu au grave.

Il ne faut pas confondre le fifre et le galoubet. Le fifre est un petit instrument en bois appartenant à la famille des flûtes traversières. Il est fabriqué dans les mêmes bois que le galoubet mais aussi en canne de Provence (Arundo donax). Il comporte six ou sept trous de jeu, et sa tonalité est plutôt le mi bémol, le ré ou le si bémol. Le fifre était joué dans l’armée, de manière officielle à partir du XVIe siècle.

Paul Uleri est musicien et facteur d’instruments à Nans-les-Pins (Var), il considère « comme beaucoup de tambourinaires… que pour devenir un musicien accompli il faut savoir fabriquer ses instruments et jouer avec ». Il s’est intéressé très tôt à la lutherie et comme il le dit lui-même : « J’ai eu la chance de voir plusieurs fois à l’œuvre le regretté Marius Fabre(1*) qui n’était pas avare lorsqu’il fallait montrer ses talents de luthier et ses coups de main. J’ai donc pu l’observer tourner des galoubets et des massettes ainsi que sculpter et cintrer des tambourins. »

 

Noëlle Dorion
Présidente du comité de rédaction et membre du conseil d’administration de la SNHF

 

(1*) Marius Fabre et son fils André Fabre font partie des facteurs du XXe siècle comme Ferdinand Bain et Joseph Bœuf.