Pépinières fruitières Dalival : Les fruits d’une fusion

À l’origine concurrentes, deux entreprises ont fusionné pour donner naissance, aujourd’hui, à l’une des plus grandes pépinières fruitières de France : Dalival. Voici l’histoire du cheminement de ces exploitations familiales qui ont fini par se rapprocher pour unir leurs talents : les Pépinières du Valois et la pépinière Davodeau-Ligonnière.

L’histoire de Dalival commence par deux destins parallèles », explique Fiona Davidson, en charge de la communication de la société. Dans les années 1950, à Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire), Jean Davodeau et Raymond Ligonnière créent une pépinière d’horticulture ornementale, fruitière et de rosiers, une des réputations de la région. « Ils se concentrent sur la pépinière fruitière et la sélection du pommier, auquel Raymond voue une véritable passion », ajoute Fiona. Jean Davodeau n’ayant pas de descendance pour prendre sa suite, Guy Ligonnière, fils de Raymond, reprend alors l’entreprise en 1974, pour ensuite passer la main à son frère Thierry en 2010.

Un grand voyageur

Parallèlement, Charles André, chef de verger dans le Nord, fonde en 1957 « les Pépinières du Valois », pépinière fruitière sur le domaine du château de Noüe, une propriété qu’il a achetée à Villers-Cotterêts, dans l’Aisne. Peu satisfait des arbres qu’il trouvait sur le marché pour son verger, il produit ses propres scions, livre ensuite ses voisins et démarre son entreprise de pépinière. « Passionné, comme Jean Davodeau et Raymond Ligonnière, grand travailleur, il était capable, dans les années 1960, de faire le trajet en bateau vers la Nouvelle-Zélande ou les États-Unis pour visiter des pépinières et découvrir des variétés », précise Fiona Davidson. Étant sans enfants, sa préoccupation était de transmettre son entreprise. Il a accueilli de nombreux stagiaires qui, plus tard, lui ont permis de tisser un réseau mondial pour la sélection et l’évaluation variétale, encore actif de nos jours. Charles André avait embauché Bruno Essner dans l’objectif de le former à ses côtés, mais décède brutalement en 1991.

La greffe du rapprochement

« À l’origine, les deux pépinières ne se parlaient surtout pas », souligne Fiona Davidson. Mais les temps ont changé et, petit à petit, elles se sont mises à dialoguer. Si les deux entreprises présentaient des profils dif­férents, elles avaient chacune développé une forte activité recherche et développement, très lourde pour une PME.

Guy Ligonnière et Bruno Essner unissent alors leurs forces et créent à Angers, en 2004, IFO*, une structure spécialisée dans la recherche et le développement de porte-greffe et de variétés de pommiers et poiriers. Ce premier rapprochement aboutit, en 2012, à un second : la fusion des deux entreprises et la création de Dalival. La greffe a bien pris entre ces deux sociétés très complémentaires.

Une production localisée

Aujourd’hui, l’activité principale de Dalival est la pépinière fruitière, avec la production de scions de fruitiers pour les arboriculteurs professionnels, en pommiers, poiriers, fruitiers à noyau et pommiers à cidre. Elle produit aussi des porte-greffe, greffons et écussons, en partie pour « l’autoconsommation », mais également pour la vente aux professionnels, dans toute l’Europe.

Si le siège de Dalival se situe dans l’Aisne, elle possède dix sites de production en France et en Europe. « Nous ne pratiquons pas de délocalisation de la production, explique Fiona Davidson, nos sites de production en Europe visent à livrer les clients de proximité. Nous produisons sur des sites au sol et au climat proches de leurs exploitations. Si les clients ne viennent pas à nous, c’est à nous d’aller à eux. »

La France représente 30 à 50 % du chiffre d’affaires de Dalival selon les années. Parmi les destinations d’export figurent, outre l’Europe, le Maroc, l’Azerbaïdjan et la Russie.

« Nous sommes aussi arboriculteurs, avec cent hectares de vergers de pommiers et poiriers. Nous commercialisons notre production, mais nos plantations constituent aussi une vitrine de nos variétés pour nos clients », indique Fiona. Les fruits sont conditionnés dans une station d’emballage propre à l’entreprise.

R&D: un vaste programme

Au niveau organisation, l’activité R&D est pilotée par Bruno Essner, qui assure également l’administration et les finances de l’entreprise. De son côté, Thierry Ligonnière s’occupe plus particulièrement de la production et de la commercialisation. En recherche et développement, Dalival hybride des variétés, les sélectionne et les évalue. L’hybridation concerne uniquement la pomme en France, mais aussi d’autres programmes au niveau mondial en pommes, poires et cerises. La recherche porte naturellement sur les qualités gustatives mais aussi sur la résistance ou la tolérance aux maladies, les aptitudes agronomiques et sur la bonne conservation des fruits.

Une recherche spécifique

Parmi les particularités de la R&D chez Dalival figure la poire, qui demande plus de temps de sélection que la pomme (vingt à trente ans contre dix à quinze), « ce qui explique que peu de sociétés privées investissent sur cette espèce ». De même pour les porte-greffe, qui demandent quarante à cinquante ans de mise au point ! « Par exemple, nous participons au lancement commercial en Europe du porte-greffe G 11, issu du programme de Cornell aux États-Unis, tolérant au puceron lanigère, au feu bactérien, au phytophthora et au gel, explique Bruno Essner. Il offre également un très bon comportement par rapport à la fatigue du sol, un bon niveau de production, et a une mise à fruit rapide. »

Le cidre est une autre spécificité pour laquelle l’entreprise a collaboré à l’évaluation de nouvelles variétés de pommiers et au développement de porte-greffe (M116 tolérants au phytophthora avec le niveau de vigueur du MM106).

Une vision à long terme

Dalival sélectionne et évalue ses propres variétés « mais aussi celles de nos partenaires, et réciproquement », précise Fiona Davidson.

La dernière phase du travail de R&D est le développement commercial des variétés, qui est un métier encore différent des précédents. Dalival travaille ainsi au lancement des variétés de son programme d’hybridation, comme Choupette, Antarès ou plus récemment Zingy HC2-1, ou de variétés issues de programmes collaboratifs, par exemple Ariane ou Story Inored, toutes deux du programme de Novadi (Inra).

Pour arriver à bien exercer tous ces métiers, il faut une entreprise solide, car mettre au point une variété demande du temps, avec un avenir difficile à deviner. Comme aime à le souligner Thierry Ligonnière : « Nous sommes une équipe de passionnés, qui exerçons un métier de visionnaires. »

Jean-François Coffin
Journaliste et membre du comité de rédaction de Jardins de France

* www.ifo-fruit.com

KISSABEL, LA NOUVELLE MARQUE POUR LES POMMES À CHAIR ROUGE

La pomme Zingy®, variété hybridée par IFO, de couleur rouge vermillon, « croquante et juteuse, avec un bon équilibre sucre-acidité » © D.R

Kissabel est la marque qui représentera dans le monde une nouvelle gamme de variétés de pomme à chair rouge issue du programme d’IFO et de Dalival, à travers l’organisation Ifored, consortium de producteurs / metteurs en marché dans le monde. Toutes ces variétés présentent des saveurs différentes dont, pour certaines, celle de petits fruits. Les trois premières variétés de cette gamme ont été testées sur le marché européen à l’automne 2019, avec des retours extrêmement positifs. Pour Dalival et IFO, à l’initiative du projet, l’ambition est de réussir le lancement commercial de ces trois variétés d’ici les prochaines années, ainsi que d’autres nouvelles variétés de pommes à chair rouge dans treize pays et de les vendre sur les marchés du monde entier.