Les parcs publics potagers

Eric Prédine

La demande d’espaces verts en ville est de plus en plus forte, sans une augmentation proportionnelle des budgets. La continuité entre les espaces verts traditionnels et les parcs publics potagers est un moyen de satisfaire cette demande.
 

Le parc public potaer, une nouvelle conception d'espaces verts. Ici, celui de Monlong - © droits réservés

Le parc public potager, une nouvelle conception d'espaces verts. Ici, celui de Monlong - © droits réservés

 

Au parc public potager de Coutras, comme celui de Monlong de la ville de Toulouse, les allées, les cheminements et les agoras au sein du site sont considérés pleinement comme des espaces publics, ouverts aux joggers, promeneurs, aux personnes à mobilité réduite... Au jardin d’Arnaga au Haillan, près de Bordeaux, les chemins d’accès vers le groupe scolaire sont intégrés dans le site du jardin. Cette conception de parc public potager renforce les fonctionnalités multiples de l’espace. Ces jardins répondent à des demandes légitimes de détente, de promenade, de découverte, de pratique du jardinage. La présence des uns ou des autres habitants protège le site. La pertinence et l’expertise des usagers diminuent les malfaçons ou les dégradations. Bien souvent, ce sont les habitants devenus jardiniers qui, spontanément, restaurent les petites dégradations liées simplement à l’usage ou à la désinvolture.

 

Attention aux écueils

Les potagers sont autant de massifs entretenus qui attirent l’œil, interrogent le néophyte ou simplement le badaud. Ces massifs ne coûtent rien en entretien à la collectivité et sont profitables à celui qui manie la binette. C’est tout bénéfice ! Toutefois, les écueils ne manquent pas, si le maître d'ouvrage n’est pas vigilant dans la conduite de ces nouvelles initiatives. Par exemple : s'il ne mise pas sur une animation compétente qui permet de faire de la médiation mais aussi de garantir le cadre fixé dès le début, s’il n’y a pas de concertation réelle avec les futurs usagers, s’il n’y a pas de volonté politique de soutenir ces projets, si le projet est mal dimensionné à l’aune des besoins réels, le jardin partagé peut aussi se transformer en jachère.

 

Urbanité à cultiver

C'est pourquoi la conception de cette nouvelle forme d'aménagement d'espace vert nécessite de concevoir de la souplesse dans son fonctionnement. Les potagers peuvent facilement évoluer vers des massifs conventionnels ou inversement en fonction de la dynamique sociale instaurée sur le site. Cette capacité d'adaptation de l'équipement s'obtient en considérant la fertilité du sol comme un facteur essentiel, ce qui est aujourd'hui encore trop rare dans les équipes de maîtrise d'oeuvre paysagiste, formées à l'excellence d'aménageur, mais souvent piètres agronomes. Rien n'est plus simple que de changer de destination de culture, une terre humifère. C'est d'autant plus opportun, que l'exigence qualitative des désirs des habitants, comme celle de l'intérêt général de la bonne gestion de nos montagnes de déchets, entraînent l'intégration, dans les parcs publics potagers, d'espaces de compostage collectif et partagé. La ville a une multitude d'atouts pour réaliser des potagers publics : de la matière organique à profusion dans ses poubelles, un désir exacerbé de nature par ses habitants, une sécurité alimentaire à reconquérir comme autant de prétextes à cultiver autrement notre urbanité.