L’aquaponie : un exemple d’économie circulaire en agriculture urbaine

Pierre Foucard

Les systèmes de pisciculture en circuits dits « recirculés » permettent de mixer culture hors sol et pisciculture : la partie aquaculture voit son impact environnemental, notamment par rapport à l’usage de l’eau, réduit.

Dans le même temps, la production végétale hors-sol permet de mieux maîtriser l’usage des intrants et la consommation en eau. C’est dans ce contexte que l’Institut technique des filières avicoles cunicoles et piscicoles (Itavi) a déposé un projet nommé Apiva (Aquaponie innovation végétale et aquaculture) visant à tester les performances de l’aquaponie, un système d’élevage intégrant les bénéfices des systèmes recirculés et ceux de la culture végétale hors-sol.

L’eau sert à la fois de support d’élevage aux poissons et de solution fertilisante pour les végétaux - © Jaubert
L’eau sert à la fois de support d’élevage aux poissons et de solution
fertilisante pour les végétaux – © Jaubert

Système recirculé + culture hors-sol = aquaponie

En aquaponie, les rejets dissous issus de l’aquaculture sont des sources de nutriments qui peuvent être assimilés par les végétaux au niveau du complexe racinaire grâce à une étape préalable de dégradation microbienne des composés ammoniacaux par des bactéries nitrifiantes et d’élimination des matières particulaires par une filtration mécanique adéquate. Ces deux étapes permettent de recycler l’eau et de la rendre saine à la fois pour l’élevage de poissons, pour la culture de végétaux et pour le développement de colonies de bactéries nitrifiantes.

L’aquaponie intéresse aujourd’hui de plus en plus les acteurs du végétal et de la filière piscicole car elle présente de nombreux avantages. L’eau sert à la fois de support d’élevage aux poissons et de solution fertilisante pour les végétaux. Il est possible avec cette technique de se passer totalement d’intrants NPK (azote/phosphore/potassium) pour la production de végétaux hors sol, tout en consommant jusqu’à 95 % moins d’eau qu’en culture de plein champ ou en pisciculture conventionnelle. Elle n’en reste pas moins une entreprise complexe, qui nécessite des compétences variées et un dimensionnement précis, tandis que les modèles économiques restent à affiner pour faire en faire une activité économiquement viable.

Figure n° 1 : Principe de fonctionnement d’un système aquaponique - © Pierre Foucard
Figure n° 1 : Principe de fonctionnement d’un système aquaponique – © Pierre Foucard

L'AQUAPONIE, UNE TECHNIQUE ANCESTRALE

L'aquaponie s'inspire de techniques anciennes, notamment aztèques ou asiatiques - © c2ap - Adobe Stock
L’aquaponie s’inspire de techniques anciennes, notamment aztèques ou asiatiques – © c2ap – Adobe Stock

Les Aztèques (1200-1521) cultivaient des jardins flottants en milieu lacustre. Ces chinampas étaient des structures constituées d’un réseau de joncs, de roseaux et de feuillages, recouvertes à la surface par des boues issues du fond des lacs, riches en débris organiques et en nutriments en décomposition, disposées en couches successives séparées par des débris végétaux en décomposition. Ils étaient irrigués par des eaux enrichies en nutriments : les déjections des poissons accumulées au fond des plans d’eau.

En Chine et en Thaïlande, des systèmes de rizi-pisciculture couplaient la production de riz avec celle de carpes et/ou d’anguilles. Ceci permettait l’apport d’un engrais naturel (déjections de poissons) et la lutte biologique contre les insectes ravageurs des plants de riz, dont les poissons se nourrissent. La rizipisciculture, minoritaire aujourd’hui, a subsisté dans certains pays asiatiques. Grâce à cette forme d’élevage, l’agriculteur diversifie sa production et bénéficie d’une source importante de protéines dans une culture alimentaire basée sur le riz.