Jardins d’exception du Mentonnais : Une association dédiée à leur sauvegarde

L’Association pour la sauvegarde des jardins d’exception du Mentonnais (ASJEM) a été créée en 2022, avec pour objectifs la préservation,  le renouveau et la valorisation de ces jardins. Pour l’équipe mise en place et soutenue par la ville de Menton, il s’agit de maintenir sur ces sites un haut niveau de qualité et de diversité botanique, mais aussi d’assurer leur attrait touristique.

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L’ensemble des jardins de Menton (Alpes-Maritimes) et de la Riviera franco-italienne enrichissent l’exceptionnel patrimoine naturel et exotique de ce territoire. Ils appartiennent à la ville de Menton, au Conservatoire du littoral, à l’université de Gênes, au Muséum national d’Histoire naturelle, ou encore à des particuliers, certains étant classés Monument historique, d’autres Jardin remarquable. « Je ne connais pas d’autre ville en France qui possède autant de jardins ayant une telle identité et une telle qualité botanique », estime Gilles Deparis, directeur de l’Association pour la sauvegarde des jardins d’exception du Mentonnais (ASJEM). Créer une dynamique entre tous ces acteurs, au service de cette région, est au cœur de la mission de l’ASJEM, à l’heure où le tourisme bénéficie du mouvement global de renouveau de l’intérêt du public pour les jardins.

Clos du Peyronnet © Y. Monel
Serre de la Madone © Y. Mone

Une gestion mutualisée

Beaucoup de ces jardins ont besoin aujourd’hui d’importantes restaurations, leurs collections botaniques sont à sauvegarder et à enrichir, et tous méritent une importante mise en valeur. La ville de Menton elle-même n’avait pas les moyens ni les compétences pour restaurer et entretenir les trois jardins dont elle assure la gestion: la Serre de la Madone, propriété du Conservatoire du Littoral depuis 1999, la Villa Maria Serena et le palais Carnolès, la municipalité souhaitant, pour ce dernier, tout mettre en œuvre pour retrouver le label perdu de Jardin remarquable.

La nouvelle association a été créée en avril 2022 sur une initiative de Michael Likierman, propriétaire des Colombières, avec Judith Waterfield, propriétaire du Clos du Peyronnet, et la municipalité s’est adossée au projet, en mettant en place, en avril 2023, une nouvelle direction dédiée aux jardins d’exception. Nommé à la tête de celle-ci, Gilles Deparis, directeur par ailleurs de l’ASJEM, peut donc mener à bien les actions envisagées. L’équipe mise en place assure la gestion des trois jardins précités, et si les autres jardins adhérents ont leurs propres jardiniers, l’association les aide dans leur gestion technique en mettant des spécialistes à leur disposition et en mutualisant leurs interventions.

Développer la richesse botanique

Un autre objectif est la mutualisation des collections botaniques de ces sites, dont plusieurs sont agréées par le CCVS (Conservatoire des collections végétales spécialisées): bulbes d’Afrique du Sud au Clos du Peyronnet, protéacées, pittosporacées et araliacées rustiques à Serre de la Madone, près de 140 variétés d’agrumes à Carnolès… La villa Maria Serena était réputée pour sa palmeraie, mais 80 % des sujets ont malheureusement disparu suite aux invasions parasitaires.

© Y. Monel

L’association aide à gérer ces collections, à réaliser les inventaires, à étiqueter les sujets. Autant d’actions qui permettent de protéger et de valoriser ce patrimoine inestimable, de promouvoir la connaissance, l’étude, la culture et la sauvegarde de ces plants, tant indigènes qu’exotiques. Elle apporte une aide d’expert en botanique, notamment à la ville de Menton: un plan de gestion a été établi pour réaliser un inventaire de leur richesse botanique et poser un diagnostic pour leur rénovation.

La ville a ainsi délégué la maîtrise d’ouvrage à l’association, qui la conseille aussi dans le choix d’essences mieux adaptées aux conditions actuelles en remplacement des nombreux palmiers disparus. Concernant plus précisément Serre de la Madone, la maîtrise d’ouvrage, et donc les travaux, ont été délégués par le Conservatoire du littoral, qui en est propriétaire. En projet, l’agrément de nouvelles collections et une reconnaissance en tant que Jardin botanique de France.

L’ASJEM s’appuie pour cela sur les compétences d’un comité scientifique, composé de botanistes, de paysagistes (comme Jean Mus et Arnaud Maurières, qui a posé dès le début les bases stratégiques du projet), de personnalités reconnues dans le domaine des jardins (comme Chantal Colleu-Dumont, directrice du Domaine de Chaumont-sur-Loire), ou encore d’architectes. Cet aréopage d’experts se réunit régulièrement pour accompagner et guider l’équipe.

Palais Carnolès © Y. Monel
Palais Carnolès © Y. Monel
Colombières © Y. Monel
Colombières © Y. Monel
Colombières © Y. Monel
Serre de la Madone © Y. Monel
Serre de la Madone © Y. Monel

DOUZE JARDINS D'EXCEPTION SUR LA RIVIERA

Sur Menton (Alpes-Maritimes), l’Association pour la sauvegarde des jardins d’exception du Mentonnais (ASJEM) réunit le jardin Serre de La Madone, le jardin du palais de Carnolès et la Villa Maria Serena, ainsi que les jardins de trois palaces, L’Impérial, le Winter Palace et le Riviera Palace. Ce patrimoine exceptionnel, témoin de la Belle Époque, accueillait les hivernants venus de toute l’Europe en villégiature.

La Citronneraie, ancienne propriété agricole du XVIe siècle à l’origine plantée d’oliviers, a été dédiée à partir des années 1950 à la culture agrumicole pour fournir des citrons aux chefs cuisiniers du monde entier. La propriété s’est aussi enrichie d’un magnifique jardin d’agrément de plantes exotiques. Le jardin botanique Val Rahmeh, géré par le Muséum national d’Histoire naturelle, réunit près de 1 700 espèces. Il porte le nom de l’épouse de Sir Percy Radcliffe (Rahmeh signifie « tranquillité » en arabo-persan), militaire britannique qui s’est installé ici au début du XXe siècle. D’autres jardins, privés, sont classés Monuments historiques : le domaine des Colombières, réalisation de Ferdinand Bac dans les années 1920, et le Clos du Peyronnet, où la famille Waterfield collectionne plus de 600 espèces subtropicales et méditerranéennes depuis plusieurs générations.

Le jardin botanique Hanbury à Vintimille (Italie), fruit de la passion naturaliste d’une famille anglaise de pharmaciens, géré aujourd’hui par l’université de Gênes, rassemble sur 18 hectares pas moins de 5 800 espèces végétales. Et le jardin de la Villa Boccanegra, à Latte, également en Italie, est aussi un jardin privé, restauré par ses propriétaires actuels qui y expérimentent l’acclimatation de nouvelles plantes du monde entier. Il avait été créé en 1905 par Ellen Willmott qui voulait y cultiver les plantes découvertes dans le jardin de son voisin Thomas Hanbury en les plantant de la manière la plus naturelle possible pour évoquer la végétation sauvage de ces pentes méditerranéennes.

Une valorisation pédagogique et culturelle

Les missions de l’association sont donc techniques et scientifiques, mais également touristiques. « Notre rôle est aussi de valoriser ces jardins d’exception, de les faire visiter, de mettre en place des parcours de découverte, de sensibiliser notamment les jeunes publics », explique Gilles Deparis. Elle prévoit aussi l’organisation d’expéditions, de conférences, d’échanges, de voyages et autres activités autour des plantes et des jardins.

L’ASJEM travaille pour cela avec l’Office de tourisme Menton Riviera et Merveilles et plusieurs événements à venir vont permettre d’alimenter et de dynamiser une large communication: les 100 ans de la Serre de la Madone l’année prochaine, en 2025 les 30 ans de la rénovation des Colombières, ou encore les 300 ans du jardin de Carnolès.

Marie-Hélène Rocher-Loaëc
Membre du comité de rédaction de Jardins de France