Graines germées et jeunes pousses : des usages et bienfaits redécouverts

Jean-Noël Plagès

De nombreux pays ont consommé des graines de céréales germées comme l’orge chez les Sumériens, le blé chez les Celtes et le froment au début du christianisme. On mange alors la graine, le cotylédon et les petites racines.

Un texte de l’évangile (Evangile selon Saint Jean) précise les techniques de germination des graines mais on ne sait pas si cela se rapporte aux graines germées consommées en l’état ou à la germination pour la culture de la plante. Les égyptiens utilisaient le blé germé dans la fabrication du pain mais cette coutume est répandue dans tout le Moyen-Orient.

Pour la fabrication de la bière, on utilise des grains d’orge en Europe ou de mil en Afrique qui sont mis à germer (malt). Le capitaine Cook aurait sauvé ses équipages du scorbut en leur donnant à manger de l’orge germé ébouillanté.

Le soja arrive en force

Les « germes de soja » sont, en réalité, des graines germées de haricot mungo – © J.-F. Coffin

Incontestablement, les « pousses de soja » ont fait connaître les bienfaits des graines germées en Occident. Il est assez difficile de retrouver la date exacte car la consommation est soumise aux modifications des pratiques alimentaires et à la découverte des anciennes civilisations. Au milieu du 19e siècle, les relations avec l’Asie (Chine, Japon, sud-est Asiatique…) s’intensifient et font alors découvrir aux Européens les bienfaits de ce type d’aliment. D’après Désiré Bois, l’introduction en France daterait de 1911, en provenance d’Indochine.

Jusqu’au milieu du 20e siècle, la consommation se réduit à  quelques espèces avec les pousses de « soja » représentant 90 % des germes consommés.

La production de « germes de soja » en Europe, longtemps concentrée entre les mains de la diaspora chinoise, est concurrencée par d’autres produits qui font leur apparition.

C’est vers les années 80, en France, que des producteurs installent leurs germoirs et qu’une production intensive voit le jour. Pour se maintenir, face aux grosses « usines », ils doivent diversifier leurs produits et presque toutes les espèces potagères sont utilisées sauf des graines « dites toxiques » comme les graines de Solanacées (tomate, piment, aubergine).

Cependant les contraintes sanitaires vont limiter espèces et producteurs.

Du pois chiche au fenugrec

Après la seconde guerre mondiale, de nombreux pays se mettent à consommer d’autres espèces comme le radis, le céleri, le fenouil, la roquette puis, vers le milieu de la seconde moitié du 20e siècle, la gamme de produits s’élargit. On trouve la luzerne, la lentille, le pois chiche, le fenugrec, l’avoine…

Suivant les traditions culinaires, chaque pays européen développe ses propres espèces comme l’oignon et le poireau au Royaume-Uni, les choux et les brocolis en Italie.

Enfin, on voit apparaître des graines germées d’épinard, de sarrasin, de sésame, de quinoa…

Les jeunes pousses débarquent

Les jeunes pousses de légumes et de condiments voient le jour en Amérique du Nord comme « aliments santé », plus riches que les plantes développées. La commercialisation de jeunes pousses de betterave rouge, d’épinard, de céleri, de roquette, de moutarde japonaise, de chou japonais devient très courante.

Graines germées – © Adobe Stock – aboikis

Actuellement, on peut trouver des laitues, arroches, épinards, oseilles, amarantes, poirées, betteraves, choux chinois, moutardes, pourpiers, ficoïdes glaciales, roquettes, choux… autant de légumes dont les feuilles, récoltées immatures, offrent leur fraîcheur et leur croquant de jeunes pousses.

Aujourd’hui, la production des « graines germées » et de « jeunes pousses » permet un bon approvisionnement du consommateur en produits frais et de qualité.

A lire

D. BOIS ; Les plantes alimentaires chez tous les peuples et à travers les âges ; histoire, utilisation, culture de phanérogames légumières ; 1927, Encyclopédie biologique, Paul Lechevalier, éditeur, PARIS