Fruits et légumes au coeur de la cuisine japonaise

André Krafft

La culture alimentaire japonaise centrée sur le riz a évolué à la suite de l’introduction d’Asie de la culture du riz irrigué, il y a plus de 2000 ans. La tradition du riz servi avec des légumes et du poisson de saison et d’autres produits marins a atteint une forme extrêmement sophistiquée au cours de la période Edo (1600-1868) et demeure le cœur vivant de la cuisine japonaise. Toutefois, depuis la réouverture du Japon à l’Occident, en 1868, le pays a développé une culture alimentaire extrêmement riche et diversifiée qui, à côté de la cuisine japonaise, inclut de nombreux plats étrangers, (Yôshoku) plus ou moins inchangés.

Kaiseki Ryori, présentation artistique d'ingrédients frais de saisonHérité du XIXe siècle, le «  kaiseki ryori » (cuisine traditionnelle)  met l’accent sur la présentation artistique d’ingrédients frais de saison ;  il est toujours servi dans  les ryotei, restaurants japonais de premier rang et dans les Ryokan, auberges traditionnelles. Le saké est la boisson consommée pendant le repas et, parce que les Japonais ne mangent généralement pas de riz lorsqu’ils boivent du saké, le riz est servi à la fin. Des entrées, du sashimi (poisson cru), un suimono (soupe claire), des yakimono (aliments grillés), des mushimono (aliments cuits à la vapeur), des nimono (aliments mijotés), et des aemono ( salades) sont servis en premier, suivis d’une soupe au miso ( pâte de soja fermenté), et de tsukemono ( légumes marinés), de riz, de confiseries japonaises et de fruits. Les types d’aliments et l’ordre dans lequel ils sont servis dans le cadre du kaiseki ryori sont la base d’un repas japonais complet contemporain.

 

Riz et petits légumes

A l’exception des régions rurales les plus isolées, un dîner  préparé à la maison comprendra en général du riz blanc, de la soupe de miso, et des petits légumes macérés (tsukemono). Les différents  plats qui accompagnent varient considérablement selon la région et la saison, mais il est fort probable qu’il s’agisse de légumes cuits, de tofu, de  poisson grillé, de sashimi ainsi que de viande de bœuf, de porc grillé ou de poulet, cuisinés de différentes manières.



La consommation de légumes se retrouve dans des plats importés, adaptés aux goûts japonais tel que les :
Tempura : fruits de mer et légumes trempés dans une pâte faite de farine et d’eau glacée, et ensuite frits
Teppanyaki : viande, poisson, crustacés ou légumes grillés sur une plaque de fer
Sukiyaki et Shabu-shabu : fines tranches de bœuf  cuites légèrement avec des légumes et des pâtes de soja dans une marmite spéciale en fonte. Le sukiyaki date des années 1859, lors de l’ouverture aux étrangers du Port de Yokohama.
Tonkatsu : C’est une escalope de porc panée, frite, qui se mange avec une sauce de type Worcestershire, accompagnée de chou cru finement émincé.

 
Les japonais mangent souvent à l’extérieur de chez eux. Rien qu’ à Tokyo il y a 160 000 restaurants (15 000 à Paris) dont 14 trois étoiles Michelin. A l’inverse dans moins de 10 % des restaurants japonais à l’étranger (dont la France) les cuisiniers sont japonais et  malheureusement ils ne servent pas de la nourriture japonaise authentique.

Depuis la fin du XVe siècle et l’arrivée des premiers occidentaux jusqu’à nos jours le Japon en permanence s’interroge sur un dilemme : tradition ou modernité qu’il cherche toujours à combiner. Le cadeau est une tradition du lien social japonais. Offrir un fruit parfait (Melon, pastèque, fraise, raisin..) d’origine occidentale, en est un exemple. Il existe des producteurs spécialisés pour ce marché qui vendent leurs produits à des prix astronomiques.

 


Une production dispersée

Le Japon est un archipel volcanique ;  les zones de montagnes et de forêts représentent les deux tiers : la surface agricole est seulement de 12,6% . L’agriculture japonaise se caractérise, hormis sur l’île d’Hokkaido au nord, par un grand nombre de petites exploitations dont la plupart ont une taille inférieure à deux hectares. La production horticole est très souvent un complément dont la femme a la charge. 70 % des agriculteurs ont plus de 55 ans.. Le taux global d’autosuffisance alimentaire qui est de 40 %, monte à 85 % pour les fruits et légumes.  De ce fait, il n’y a pas de spécialisation de la production par région, même si, en hiver,  les productions viennent beaucoup de l’ile de Honshu au sud et en été de Hokkaido au nord. La non concentration de la production assure également la survivance de productions locales de qualité.
Cela permet de récolter les légumes à maturité car les délais d’acheminement sont en moyenne inférieurs à 3 jours.  La production sous tunnel est très importante à la fois pour la maîtrise des conditions de culture mais également pour garantir la qualité y compris pour les fruits tels que la cerise, le raisin ou la pêche. Pour répondre au niveau de qualité exigé par le consommateur japonais des fruits comme la pêche, le nashi (poire ) ou  le raisin sont empaquetés individuellement puis placés  dans une cagette ; le maïs doux voyage dans un carton mélangé avec de la glace.


En linéaires, en  général, tous les légumes sont présentés sous blister ou pochette plastique. Les supermarchés ouverts tard le soir (jusqu'à 2 heures du matin) appliquent un premier rabais vers 21 :00 puis un autre vers 23 h pour n’avoir que des produits frais à l’ouverture le lendemain vers 10 h du matin. Les supermarchés vendent également des plats cuisinés comprenant des légumes comme les Tempura et les boites repas (bento). La vente directe qui avait presque disparu, revient avec  les « restaurants de ferme » (Cocokichi ) , les marchés de quartier et les achats sur Internet. A côté d’un nombre important (+/- 50) de sociétés professionnelles de sélection de fruits et légumes (Takii fondé en 1785) survivent des sélectionneurs indépendants spécialisés dans une ou deux espèces qui licencient leur variétés à ces grandes sociétés ou à des distributeurs locaux. Presque tous travaillent sur les hybrides. Ainsi la fameuse gamme de brocoli de Sakata serait le fruit du travail d’un chercheur indépendant. L’accident de Fukushima a vu l’émergence d’usine à légumes feuilles, sous contrôle sanitaire tel un laboratoire.

Usine à légumes feuilles

Légumes de montagne sous blister (Sansai)



 

 

 

Consommer, un acte culturel

A une échelle encore moindre,  des passionnés maintiennent des vieilles variétés locales (Dento Yasai) car manger, au Japon, est aussi un acte culturel. Ainsi chaque région a ses spécialités tel que les Kaga et Noto Yasai pour la préfecture  d’Ishikawa dans l’ouest  les Hida Yasai au centre et les Akita Yasai au  nord du Japon, ces derniers étant bien adaptés à la conservation en saumure (Tsukemono)
Enfin les japonais mangent  des plantes sauvages appelées sansei  car récoltées dans les montagnes. Il y en a beaucoup. Par exemple le asatsuki ( une espèce de ciboule), le nobiru ( comme une gousse d’ail), le warabi et le zenmai ( deux variétés de pousse de fougère). Au printemps quand les pousses et les bourgeons des arbres sont tendres, on récolte le fukimoto, le taranome, le koshiabura, ainsi que le tsukushi ( asperge). On les sert habituellement en Tempura.
Le sept janvier, à la fin des festivités du nouvel an, les Japonais consomment le nanakusa-gayu, un gruau de riz cuit avec sept herbes sauvages, tradition oblige.

Les légumes et fruits japonais (PDF)

Melon cadeau à 70 euros Légumes en saumure