Changement climatique : des plantes tolérantes pour le jardin
Fabien Robert
Les plantes sont fortement dépendantes des conditions environnementales et en particulier des conditions climatiques. Le changement climatique actuel induit par les activités humaines tend, selon les experts, à s’amplifier. Il a d’ores et déjà des conséquences visibles sur nos jardins. Les professionnels se mobilisent pour apporter des réponses.
Des effets directs sur la ressource en eau
Si l’eau ne constitue pas globalement un problème en France, des périodes sèches durables peuvent toutefois avoir lieu, induisant souvent une qualité moindre des plantes dans le jardin et des récoltes plus faibles. Les professionnels de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage travaillent à identifier les plantes qui peuvent tolérer de telles périodes de sécheresse, notamment pour des utilisations hors-sol telles les jardinières pour balcons et terrasses. Il s’agit, dans ce cas, non pas de repérer des plantes résistantes à la sécheresse (plantes xérophytes et plantes reviviscentes), mais plutôt des plantes qui restent esthétiques pendant le manque d’eau, continuant ainsi à assurer leur fonction principale d’ornement (Photo 1). Du côté des végétaux ligneux, les taxons acceptant les sécheresses estivales et qui résistent au froid comme le chêne vert, le pin d’Alep, qui proviennent des zones méditerranéennes septentrionales ou de l’arc atlantique, peuvent être envisagés dans les jardins des zones (encore) classées à climat semi-continental.
A contrario, des épisodes humides ont, comme conséquence, des sols détrempés, asphyxiants, qui conduisent à la mort des végétaux. Les plantes caduques seront mieux adaptées à ces situations, leur arrêt végétatif hivernal correspondant à ces périodes trop humides.
Des plantes affaiblies sensibles aux parasites
Au-delà de l’effet direct du changement climatique sur la plante, effet le plus visible, les périodes de sécheresse conduisent aussi à l’affaiblissement des plantes. Des parasites ou maladies de faiblesses peuvent alors se développer sur les plantes fragilisées : certains champignons aériens (de dépérissement comme Volutella) ou telluriques (pourridiés, Phytophthora en conditions asphyxiantes), les chancres à bactéries, les insectes xylophages comme les scolytes pour les sujets ligneux de plus grande taille… Ces parasites profitent de cuticules foliaires moins épaisses, d’un métabolisme secondaire moins actif (protéines toxiques pour le bioagresseur, enzymes de dégradation, molécules oxydantes, etc.).
À l’instar de la lutte directe contre la sécheresse, l’objectif des jardiniers est donc d’avoir des plantes tolérantes et mieux adaptées à ces nouvelles situations d’alternances climatiques. Dans ce but, et pour que les professionnels de la filière
puissent répondre à ces nouveaux besoins, l’Institut technique Astredhor évalue le bénéfice de l’association des plantes avec des champignons à mycorhizes (Photo 2). Ces champignons permettent une prospection du sol plus importante pour l’eau et les minéraux et permettent à la plante associée de mieux résister aux épisodes secs.
Avancement de la végétation : bonheur ou malheur
L’augmentation du réchauffement moyen a pour effet l’avancement de la végétation et des floraisons. Ce phénomène peut faire le bonheur du jardinier comme son malheur car ces croissances avancées exposent les parties végétales juvéniles aux gelées tardives pouvant anéantir une récolte prometteuse ou encore affecter l’esthétisme des végétaux ornementaux. Les solutions résident dans l’utilisation de végétaux à débourrement ou à floraisons tardives pour éviter les risques d’endommagement. Ces informations sont classiquement indiquées sur les étiquettes des plantes ou peuvent être obtenues auprès des professionnels en points de vente.
Des influences sur les bioagresseurs
Ces changements climatiques ont également pour conséquence une modification de la répartition des bioagresseurs. Des ravageurs et des maladies se développent dans le nord et l’est de la France, alors qu’ils étaient classiquement observés dans des zones plus chaudes (arc océanique, région méditerranéenne). Ces bioagresseurs profitent aussi de l’affaiblissement des végétaux statiques qui ne peuvent s’adapter rapidement.
S’ajoutent l’arrivée dans les jardins de nouveaux venus et la modification du comportement de bioagresseurs qui acquièrent un nouveau caractère pathogène. C’est le cas de la noctuelle méditerranéenne Spodoptera littoralis (Biosduval), très polyphage qui sévit notamment sur les solanacées et les légumineuses. Les seuls espoirs, pour les jardiniers, sont de réaliser des traitements (des solutions de biocontrôle existent pour les jardiniers amateurs) en attendant que les équilibres trophiques permettent l’action de prédateurs et de parasitoïdes.
Vers des variétés résistantes
Du côté des maladies, la voie des variétés résistantes sera la plus durable. Elle concerne plus particulièrement le potager qui bénéficie des avancées des obtentions professionnelles en plantes maraîchères. En ornement, les sélections sont plus longues et ne concernent que quelques taxons. Les professionnels s’attachent néanmoins à offrir des plantes mieux adaptées par sélection dans les variétés ou espèces existantes identifiées, soit par expérience à l’échelle des entreprises, soit dans le cadre de programmes d’expérimentation à l’échelle nationale, ex : Coleonema pulchellum, Leucophyllum langmanae, Hypericum balearicum, Gomphostigma virgatum.
La réponse des professionnels
Face au changement climatique qui impacte les plantes du jardin et les populations de bioagresseurs, les professionnels de la filière horticole commencent à proposer des plantes qui répondent à ces nouvelles situations (variétés ou espèces tolérantes à la sécheresse, à certaines maladies, plantes associées à des champignons mycorhiziens, ex : Acer pseudoplatanus, Betula verrucosa, Cornus mas, Euonymus europeus, Lonicera xylosteum, Quercus petraea, Viburnum opulus). Ces plantes devront être accompagnées, notamment lors de leurs premiers pas au jardin, de soins particuliers pour l’arrosage, le temps de l’installation du système racinaire pour les plantes en pleine terre.