ASTÉRACÉES : Entre rêve et cauchemar

Certaines espèces de la famille des astéracées sont susceptibles de porter atteinte à la santé humaine (allergies respiratoires, allergies de contact, toxicité) ou à la biodiversité (plantes exotiques envahissantes). Si elles tiennent leur nom du latin aster signifiant « étoile », les astéracées sont-elles plus proches du rêve ou du cauchemar ?

Astéracées et allergies respiratoires

Ambroisie à feuille d’armoise (Ambrosia artemisiifolia), Flore pittoresque et médicale des Antilles, Descourtilz, 1821.

L’allergie respiratoire est due à des particules protéiques, libérées par le pollen, qui déterminent le potentiel allergisant d’une plante. D’autres facteurs influent également sur le risque d’allergie : outre la quantité de pollen émise par une plante, les pollens les plus légers « flotteront » davantage dans l’air augmentant le risque d’exposition, et les pollens de petites tailles pénétreront plus facilement les voies respiratoires.

Dans ce cadre, la majorité des astéracées présentent un potentiel allergisant moyen, mais le risque d’allergie est faible. En effet, la plupart des espèces sont pollinisées par les insectes et l’on retrouve peu leurs grains de pollen dans l’air, à l’inverse des plantes dont la pollinisation est assurée par le vent. Certaines espèces font toutefois exception, parmi lesquelles l’ambroisie à feuille d’armoise (Ambrosia artemisiifolia) ainsi que d’autres espèces d’ambroisie (A. trifida, A. tenuifolia, A. psylostachia et A. maritima).

Originaire d’Amérique du Nord, la présence de l’ambroisie est attestée en Europe dès le milieu du XIXe siècle. Les premières allergies à l’ambroisie datent de 1950 en Région parisienne et des années 1960 en région Rhône-Alpes, où elles constituent aujourd’hui un problème de santé publique. L’ambroisie présente des traits biologiques favorisant le risque allergique : en période de pollinisation, août et septembre, un pied peut produire jusqu’à 2,5 milliards de grains de pollen, volatils, pouvant être dispersés jusqu’à 100 kilomètres. De plus, le seuil de déclenchement de l’allergie est très faible pour l’ambroisie : entre 1 et 3 grains/m3 d’air pour les personnes les plus sensibles, et entre 10 et 50 grains/m3 pour les autres.

 

Astéracées et allergies de contact

La famille des astéracées est l’une des plus impliquées dans les allergies de contact en Europe (dermites), avec près de 200 espèces sauvages, ornementales et alimentaires potentiellement allergisantes.

Les allergènes principaux sont des lactones sesquiterpéniques, présents dans les feuilles, les tiges, les fleurs et de manière concentrée dans les trichomes, des poils glandulaires présents sous les feuilles et dans les inflorescences.

Dans la famille des astéracées, certaines espèces présentent un pouvoir sensibilisant plus important, notamment l’arnica (Arnica montana), la grande camomille (Tanacetum parthenium) ou la camomille puante (Anthemis cotula). Les chrysanthèmes du genre Dendranthema seraient, quant à elle, le plus souvent à l’origine de ce type d’allergies. Les professionnels au contact de ces plantes demeurent les plus touchés.

Pour les personnes sensibilisées, ce type d’allergies se rencontre aussi avec les produits cosmétiques élaborés à partir d’astéracées telles que le souci, la camomille ou l’arnica.

Astéracées et toxicité

Certaines astéracées contiennent des alcaloïdes pyrrolizidiniques, qui constituent un mécanisme de défense contre les animaux herbivores. Leur consommation régulière en tant que plantes médicinales ou en infusion peut occasionner, bien que rares, des intoxications hépatiques. Les espèces concernées sont notamment les séneçons (Senecio jacobaea, Senecio vulgaris), l’eupatoire (Eupatorium cannabinum) ou le tussilage (Tussilago farfara).

 

Astéracées et plantes exotiques envahissantes

Une plante exotique envahissante est une plante dont certaines populations peuvent, dans un territoire nouveau, devenir localement dominantes et avoir des impacts négatifs sur la biodiversité locale ou le fonctionnement des écosystèmes. Parmi les plantes exotiques envahissantes présentes en métropole, les astéracées sont probablement les plus représentées, à côté des poacées et des rosacées. L’astéracée la plus emblématique est le Baccharis halimifolia, ou séneçon en arbre, présent sur les littoraux atlantique et méditerranéen.

Originaire d’Amérique du Nord et introduit en Europe à la fin du XVIIe siècle, le Baccharis a été utilisé en ornement ainsi que pour fixer les dunes. La pollinisation des fleurs femelles conduit à une production abondante de graines, parfois plus d’un million par plante, facilement dispersées par le vent grâce à la présence d’aigrettes blanches et soyeuses reconnaissables à la fin de l’été. Le Baccharis s’est ainsi largement répandu dans ces milieux et fait régulièrement l’objet de campagnes d’arrachage.

Romain Manceau
Ingénieur en horticulture