Asteraceae succulentes pour jardins méditerranéens

Les jardins méditerranéens, comme le Jardin exotique de Monaco, présentent évidemment des plantes parfaitement adaptées au climat local. Les astéracées y figurent en bonne place, avec des espèces à l’apparence très variée. Tour d’horizon avec un guide de choix.

Dans quelles conditions les planter ?

Des semis spontanés de Kleinia neriifolia ont été observés au Jardin exotique de Monaco © J.-M. Solichon

Les plantes succulentes de la famille des Asteraceae présentées ici partagent plusieurs points communs, le premier étant leur sensibilité au gel, ce qui les réserve aux jardins méditerranéens. Leur période de végétation et de floraison est l’hiver, saison au cours de laquelle elles reçoivent la pluie dans leur pays d’origine. Toutes apprécient également un emplacement ensoleillé, faute de quoi leur développement n’est pas optimal.

En matière de besoins, on veillera à les planter dans un substrat bien drainant. Une poche dans une rocaille ou sur un talus, facilitant l’écoulement des eaux de pluie, leur conviendra parfaitement. Les arrosages seront limités en hiver, et on fera l’impasse si les pluies sont régulières. En été, ils ne seront guère plus nombreux, c’est la période de repos pour la plupart d’entre elles. On ne leur connaît pas d’ennemi particulier, mais des cochenilles à bouclier ont été observées sur Kleinia neriifolia.

Une autre caractéristique partagée par ces espèces est leur facilité à se propager naturellement un peu partout dans le jardin. Dans des conditions climatiques favorables, la floraison est régulière, à défaut d’être toujours abondante, tout comme la production de graines adaptées à la dispersion par le vent. Au Jardin exotique de Monaco, des semis naturels à longue distance ont été observés, particulièrement pour Kleinia neriifolia, Kleinia anteuphorbium et Othonna capensis. On sera attentif au développement de ces semis spontanés si l’on souhaite maintenir le bon ordonnancement de son jardin ou de sa rocaille. Le bon côté de la chose est que la multiplication de ces espèces est facile par la voie du semis. Elle peut également être réalisée par bouturage de tige ou division des souches.

Kleinia neriifolia Haw

Kleinia neriifolia Haw est un arbuste faiblement ramifié pouvant atteindre 2 à 3 mètres de haut, avec un tronc bien défini mesurant jusqu’à 10 cm de diamètre. Il est à feuilles caduques en saison sèche (été). Ses tiges épaissies sont marquées par les cicatrices des feuilles, ce qui est du plus bel effet. Les feuilles, légèrement charnues, et les fleurs, toutes tubulées, sont groupées au sommet de la tige. La floraison, qui attire les pollinisateurs, et la pousse des feuilles démarrent avec les pluies d’automne. Kleinia neriifolia, originaire des Iles Canaries, est une plante à la silhouette singulière qui attire l’attention. Elle peut être sensible à l’excès d’humidité en période fraîche.

Kleinia anteuphorbium (L.) Haw

Kleinia anteuphorbium (L.) Haw est un arbuste pouvant atteindre 2,50 mètres de haut mais ne dépassant en général pas 1,20 mètre. Il est originaire du nord de l’Afrique, depuis le Maroc jusqu’à la péninsule arabique. Ses tiges chlorophylliennes succulentes portent de petites feuilles sessiles ovales-lancéolées, faiblement épaissies, sur les parties jeunes, en période de végétation. La floraison, au sommet des tiges, intervient en décembre et janvier et elle est relativement peu abondante. Cette espèce tire son nom de la propriété des sucs contenus dans sa tige, qui apaisent les brûlures causées par le latex des euphorbes.

Senecio serpens G. D. Rowley

Voilà une espèce largement utilisée en région méditerranéenne jusque dans les espaces verts publics. Il faut dire que les besoins de Senecio serpens G. D. Rowley sont très limités, et qu’elle n’a pas d’ennemi connu. Dans de bonnes conditions (pour l’essentiel cela revient à être en plein soleil et dans un substrat filtrant), elle sait se montrer vigoureuse et développe facilement ses tiges rampantes ou retombantes garnies de longues feuilles succulentes subcylindriques à l’épiderme d’un beau vert bleuté.
Sa floraison hivernale est, par contre, plutôt discrète. Il semblerait que cette plante soit connue et propagée sous deux noms différents mais très semblables : Senecio serpens et S. repens. Au Jardin exotique de Monaco, la plante a été étiquetée Senecio repens pendant très longtemps, sur la foi d’un ouvrage considéré comme faisant référence. La similitude des noms a certainement contribué à faciliter la confusion.

Senecio medley-woodii Hutch

Senecio medley-woodii Hutch présente un buisson ramifié ne dépassant pas 1 mètre de hauteur. Il porte des feuilles succulentes d’un vert grisâtre, ovales-deltoïdes, recouvertes d’une fine pubescence. À la différence des précédentes, cette plante sera recherchée pour sa floraison spectaculaire, qui intervient en janvier-février. Les capitules, de 4 à 5 cm de diamètre, possèdent une rangée de fleurs ligulées d’un jaune vif du plus bel effet. Elle est originaire d’Afrique du Sud.

Senecio sempervivus Sch. Bip

Originaire d’Afrique de l’Est, Senecio sempervivus Sch. Bip est un arbuste porté par une tige tuberculée semblable à un caudex (1*), généralement cachée par d’abondantes feuilles succulentes ovales d’un singulier vert-bleuté.

Les capitules presque sphériques sont également remarquables lorsqu’ils apparaissent à la fin de l’hiver. De grande taille (3 à 5 cm de diamètre), ils comportent des fleurs toutes tubulées rouges ou rose éclatant. Cette plante mérite également d’être cultivée en pot. On veillera particulièrement à ce que le tubercule ne soit pas soumis à une humidité stagnante.

Othonna capensis L.H. Bailey

Plante vivace de taille réduite formant des touffes se développant au ras du sol, à tel point qu’il est envisageable de l’utiliser en couvre sol, Othonna capensis L.H. Bailey présente de nombreuses feuilles succulentes irrégulières, ovales plus ou moins allongées, jusqu’à 3-4 cm de long. Les capitules sont abondants de décembre à février, ligulés, d’un jaune vif, et dépassent les feuilles de quelques centimètres. C’est sans doute la plante la plus facile à cultiver de cette sélection. Attention au risque d’envahissement : au Jardin exotique de Monaco, elle s’installe jusque dans les fissures des escaliers en pierre. Son nom indique son origine géographique : la province de l’Eastern Cape, en Afrique du Sud.

Jean-Marie Solichon
Directeur honoraire du Jardin exotique de Monaco

(1*) Caudex : renflement de la partie basse du tronc et/ou des racines d’une plante, qui lui permet de stocker l’eau sous forme de sucs (plantes succulentes), afin de faire face aux périodes de sécheresse.