L’utilisation au jardin des arbres et arbustes cultivés en conteneur

Philippe Morel

Beaucoup d’arbres et la presque totalité des arbustes sont cultivés et commercialisés en pot, dénommé conteneur dans le langage horticole. Il existe plusieurs raisons à cet engouement pour ce type de culture. Mais attention, quelques règles de base sont à respecter pour la réussir, tant au niveau de la production qu’à celui de la plantation dans le jardin.

 

La culture en conteneurs présente des avantage pour le pépiniériste et le jardinier - © P. Morel

 

Pour le pépiniériste, les avantages du conteneur sont à la fois techniques et économiques. Les techniques modernes d’irrigation et de fertilisation, l’utilisation de substrats spécifiques permettent un bon contrôle de la croissance des plantes et assurent leur homogénéité. La culture hors sol des conteneurs limite le désherbage et évite le travail du sol, ainsi que les délicates et laborieuses opérations de cernage des racines, de transplantation et d’arrachage des plantes. La pénibilité des tâches et les coûts de production, de main d’œuvre en particulier, s’en trouvent ainsi fortement réduits.
De même, au moment de la commercialisation, la préparation et le stockage des commandes chez le pépiniériste, le transport par camion, puis la mise en place chez les distributeurs, comme les jardineries, sont facilités. Durant ces différentes opérations, la plante est moins soumise aux stress thermique et hydrique du fait de la présence du substrat qui protège les racines et les alimente en eau, du moins si le pépiniériste a pris le soin d’arroser ses plantes avant le départ et si la jardinerie maintient ensuite cette humidité.

 

Finie la Sainte-Catherine

Quant au jardinier, il a le plaisir de pouvoir manipuler sur le lieu de vente des plantes propres, qu’il peut comparer et choisir facilement, puis les transporter aisément dans le coffre de sa voiture. Les racines restant toujours au contact du substrat, sans se dessécher à l’air, la période de plantation n’a plus beaucoup d’importance, en évitant bien sûr les conditions climatiques extrêmes (gel, sécheresse,…). C’est l’un des avantages principaux de la culture en conteneur : la période de commercialisation peut être considérablement allongée. Finies donc les tristes plantations de novembre dans le froid et l’humidité (la fameuse Sainte Catherine), voici le retour des joies du jardin par de belles journées printanières.

 

Surveiller l’arrosage

Voilà pour la théorie, car en pratique une plantation, même en conteneur, nécessite quelques soins, qu’il est même impératif de respecter. Tout d’abord, quelles que soient la saison ou la plante, le substrat doit absolument être maintenu humide, au moment de la plantation bien sûr, mais aussi pendant plusieurs semaines, voire mois, jusqu’à ce que l’on soit sûr que les racines aient bien colonisé le sol en place. Si cette précaution essentielle n’est pas prise, la plante peut s’assécher en quelques jours en période chaude, les réserves en eau du substrat étant très faibles par rapport aux besoins de la plante à cette période. Ainsi, en conditions de production, un arbuste cultivé en conteneur peut être arrosé tous les jours en fin de printemps et en été. Sauf en automne et en hiver, il ne faut pas trop compter sur la pluie pour assurer le maintien de cette humidité du substrat. Il est donc indispensable d’arroser régulièrement, même en période pluvieuse, en prenant soin d’humidifier le substrat avant même le sol qui l’entoure. Si le substrat vient à s’assécher, il devient alors difficile de le réhumecter, les substrats utilisés en horticulture ayant la fâcheuse tendance à devenir hydrophobes, c’est-à-dire difficilement mouillables, une fois secs. La seule solution est alors d’apporter de petites quantités d’eau, plusieurs fois par jour, d’une part pour alimenter la plante régulièrement, d’autre part pour tenter de réhumecter progressivement cette masse de substrat sec. Une fois cet objectif atteint, la fréquence des arrosages peut reprendre son cours normal.

 

La culture hors sol des conteneurs limite de laborieuses opérations comme le désherbage ou le travail du sol - © P. Morel

 

Gérer les racines

Une recommandation importante porte sur la qualité des racines au moment de la plantation. Elle peut se définir à deux niveaux : leur état de santé d’une part, leur développement dans le conteneur d’autre part. Le premier point peut être évalué par la couleur, généralement claire, des racines visibles à la périphérie du pot et la cohésion de la motte. La qualité est forte quand les racines sont vivantes et nombreuses. Quand la plante a subi un grave stress (excès d’eau, gel,…), les racines meurent en quelques jours, brunissent et pourrissent. La reprise après plantation est alors très compromise.
Un autre point à observer est le développement des racines à la périphérie de la motte. Contrairement à une culture en sol, les racines d’une plante cultivée en conteneur sont forcément confinées dans le volume de substrat mis à leur disposition. Selon l’espèce, les techniques culturales appliquées en production et la durée de la culture, les racines vont présenter des configurations très différentes. Elles peuvent être fines et très nombreuses, chez des plantes à système racinaire très fasciculé comme la bruyère, ou au contraire de grosses dimensions, tournant plusieurs fois autour de la paroi du pot, chez des arbustes vigoureux comme le Forsythia. Par ailleurs, selon la fréquence des irrigations en culture et la porosité du substrat, la répartition des racines dans la motte sera très variable : si l’humidité est régulièrement répartie dans tout le substrat, les racines coloniseront toute la motte. Dans le cas contraire, elles se limiteront à la partie inférieure du pot, généralement la plus humide. Dans le cas le plus favorable (colonisation homogène du substrat par des racines nombreuses et ramifiées), la reprise après plantation et le développement ultérieur de la plante sont assurées (si les règles énoncées plus haut sont respectées).

 

Attention au chignon !

Quand les plantes présentent des racines « en chignon », formant un matelas épais de racines spiralées à la base du pot, il est déconseillé de planter en l’état. La plante pourra survivre quelques temps, surtout si l’arrosage est poursuivi régulièrement, mais l’enracinement dans le sol sera de mauvaise qualité, avec un faible ancrage. Au mieux la plante survivra sans beaucoup se développer, au pire elle sera arrachée par le vent ou basculera sous son propre poids. Dans ce cas, il est nécessaire, avant plantation, de préparer la motte en sectionnant les racines enroulées à sa périphérie et en supprimant une grande partie de celles bloquées dans la partie basse du pot. Cette opération va créer un stress chez la plante qu’il conviendra de corriger par des arrosages très réguliers pendant toute la période de reprise, mais elle va permettre au système racinaire de se ramifier rapidement et de commencer ainsi l’exploration du sol environnant en développant des racines horizontales puissantes tout autour de la motte. L’ancrage et la croissance de la plante seront ainsi assurés.

 

Attention aux racines « en chignon » dont il faudra sectionner une partie avant la plantation - © P. Morel

 

Soigner le trou de plantation

Reste une dernière recommandation à prendre en compte pour garantir de bonnes conditions de reprise puis de croissance de la plante : une préparation soignée du trou de plantation. Les opérations à réaliser sont les mêmes que pour une plante en racines nues : excaver le sol sur environ 40 cm de profondeur et 60 cm de largeur pour un arbuste de développement moyen, placer au fond du trou les mottes d’herbe si la plantation est réalisée sur gazon ; mélanger à la terre extraite (surtout si elle de mauvaise qualité) un engrais organique (une poignée de cornes broyées par exemple) et une matière organique bien décomposée (terreau du commerce, compost de déchets verts,…) dans une proportion de 15% au moins, soit une vingtaine de litres pour les dimensions ci-dessus ; replacer cette terre amendée et émiettée dans le trou et y installer la motte en tassant légèrement tout autour, enfin bien arroser.
En prenant ces quelques précautions élémentaires et en s’assurant d’une qualité minimale de la plante, en particulier de ses racines, l’utilisation de plantes cultivées en conteneur est tout à fait recommandable. Elle nécessite de la part du pépiniériste une grande technicité et une connaissance des exigences des plantes que beaucoup de professionnels maîtrisent parfaitement. Elle permet surtout au jardinier de bénéficier de plantes toujours très « présentables », prêtes à planter, presque toute l’année.


À lire

Lemaire F., Dartigues A., Rivière L.M., Charpentier S., Morel P. 2003. Cultures en pots et conteneurs. Principes agronomiques et applications. INRA Éditions.

 

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1 thoughts on “L’utilisation au jardin des arbres et arbustes cultivés en conteneur”

  1. Je crois qu’il y a des millions d’usages pour les conteneurs. J’ai vu des gens qui ont habité la-dedans, ainsi que les entreprises qui s’en servent pour envoyer de grand colis. Je ne savais pas que les conteneurs tenaient une place dans le monde du jardinage aussi !

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