Cocréation d’un jardin de soin à l’Ehpad de Bournezeau en Vendée

Au sein de l’Ehpad de Bournezeau en Vendée, le jardin de soin « des pot’âgés » a été inauguré en juin 2019 avant la pandémie de Covid-19. Véritable acteur de la prise en charge des pensionnaires,
il a bénéficié de l’implication de toute l’équipe soignante.

Accueil au jardin des pot’âgés © CAUE de la Vendée

Une volonté affichée et une équipe motivée

Dès son arrivée à l’Ehpad en 2016, la direction souhaitait d’urgence aménager le jardin pour le rendre accessible aux résidents dont 80 % se déplacent en fauteuil roulant. Début 2017, un comité de pilotage de « forces vives » a donc été constitué pour réfléchir à la co-construction de ce jardin de soin. Le budget étant limité, la direction ne pouvait pas faire appel à un paysagiste-concepteur. Le Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement (CAUE) de Vendée a accompagné le groupe de travail constitué de la direction, de soignants, d’animateurs et de bénévoles de l’idée à la réalisation. L’idée a été de créer un jardin aux ambiances contrastées, visible et accessible depuis le salon exposé à l’ouest. Il s’agissait de proposer un jardin vivrier avec potager, verger, aromatiques et poulailler pour améliorer les repas quotidiens, support d’ateliers cuisine, mais aussi d’offrir dès que possible une terrasse ombragée pour s’aérer et se connecter à la nature. Un jardin des sens était souhaité pour activer la mobilité et l’activité cognitive des résidents en tenant compte des contraintes existantes du site (topographie, usages, végétation existante à conserver, vues à amplifier, points noirs à atténuer).

Cocréer un jardin de vie pour tous

De l’idée à la réalisation, la cocréation du jardin a impliqué l’équipe soignante, les résidents et leurs familles lors de toutes les étapes. Éric Grelier, assistant de soin en gérontologie, a réalisé un premier plan retravaillé et conforté par Gaëtane de La Forge, paysagiste-conseil au CAUE 85. L’animatrice Marylène Gadé et Éric Grelier ont sollicité les résidents par le visionnage de diaporamas d’essences végétales, des ateliers-mémoire et des questionnaires autour de leurs besoins et désirs. Les plans d’organisation ont été présentés régulièrement aux familles et au maire de la commune pour connecter le futur jardin au cœur du bourg. Le plan final établi s’articule de part et d’autre d’un axe de symétrie distribuant le jardin vivrier avec son futur poulailler et son clos des gourmands, et le jardin des sens, marquant toutes les saisons. L’axe principal a été renforcé, donnant sur un cèdre existant et sur le verger de plein vent avec, au-delà, la vue sur un parc privé.

Deux années de travaux sous le signe de la frugalité

Il fallait faire avec un budget serré, une équipe de soignants motivés, des bénévoles dynamiques au savoir-faire indéniable, et associer régulièrement les résidents et leurs familles. L’alchimie a opéré.

Dès l’été 2017, des pergolas et tonnelles ont été réalisées par Éric Grelier et le groupe de bénévoles pour ombrager la terrasse et éviter la surchauffe du salon. Des tables d’aromatiques ont permis d’attirer les résidents vers l’extérieur. Ces deux années de travaux ont beaucoup attisé la curiosité des résidents et favorisé les échanges avec l’équipe soignante. Cette transformation apportait de la vie au quotidien malgré la temporalité assez longue. En 2018, une entreprise de terrassement a réalisé les allées accessibles aux personnes à mobilité réduite, qui représentaient un budget important pour la structure. Lors de l’hiver 2018, « le squelette » du jardin des sens a été planté d’arbres et de massifs d’arbustes à fruits comestibles, odorants et florifères pour renforcer la biodiversité. Le potager, basé sur le principe de la permaculture, est sorti de terre au printemps 2019. L’inauguration, sous le signe de la convivialité, a eu lieu en juin 2019. En octobre 2019, le CAUE 85 a organisé une visite pour sensibiliser des directeurs d’Ehpad et des soignants. En mars 2020, la pandémie du coronavirus a entraîné le confinement…

Un jardin de vie généreux et bienfaisant

Terrasse ombragée en 2019 © CAUE de la Vendée

Le jardin offre un havre de paix et de bien-être aux résidents et au personnel. Il crée du lien entre les résidents et leurs familles. L’équipe de soin s’y ressource également. Tous les résidents accèdent facilement au jardin depuis le salon, accompagnés pour les plus dépendants et en accès libre pour les personnes autonomes. Le jardin resitue les résidents dans le temps et dans l’espace. Ils s’y aèrent, observent la végétation à travers les saisons, aiguisent leurs sens, y déambulent. Ils s’y retrouvent seul ou en groupe, parfois en soirée. Certains aident l’équipe d’entretien à désherber et à cueillir fruits et légumes, à ramasser les œufs et à surveiller les poules. Le jardin sert de médiateur entre l’animatrice et les résidents. De nombreuses animations y sont organisées : fête conviviale, atelier cuisine, art floral pour décorer l’intérieur, atelier de gymnastique en extérieur. Les produits du jardin servent à des ateliers-mémoire aidant beaucoup à la réminiscence. « Heureusement que l’on a le jardin » est une phrase qui est revenue souvent pendant le confinement car il favorise des sorties régulières pour tous et constitue une véritable bulle d’oxygène dans un quotidien très anxiogène.

 

Des projets en perspective

Bientôt, une résidence autonome sera implantée en limite ouest du jardin. Une liaison piétonne, plantée de végétaux comestibles, accessible aux personnes à mobilité réduite, sera réalisée avec la commune pour renforcer la connexion inter-quartier entre l’Ehpad, les quartiers limitrophes et le cœur de bourg. Véritable poumon de verdure et de biodiversité, ce jardin de vie tisse des liens entre toutes les générations, et, que l’on soit contemplatif ou jardinier, représente un support de convivialité.

 

Gaëtane de la Forge
Paysagiste-conseil CAUE de la Vendée

Remerciements à Éric Grelier pour l’aide apportée à la rédaction
de cet article.