Le paillage, allié du jardinier

Jean-François Coffin

Partenaire précieux du jardinier, le paillage permet de lutter efficacement contre les mauvaises herbes du jardin, de protéger les plantes de la sécheresse et même d’améliorer la structure et la richesse du sol. Un allié aussi de l’écologie et de la biodiversité puisqu’il permet de limiter les arrosages et l’utilisation de désherbants chimiques tout en protégeant un certain nombre d’auxiliaires, ces prédateurs de parasites des plantes. De plus en plus pratiqué tant par les particuliers que les collectivités, le paillage qui consiste à recouvrir le sol d’un paillis, couche de matière végétale, minérale, voire synthétique, nécessite un minimum de connaissances tant sur la technique d’application que du matériau utilisé.

 

S’il peut paraître comme une formule magique notamment pour lutter contre les mauvaises herbes, le paillage agit physiquement et chimiquement sur la croissance des plantes. Pour croître, un végétal a besoin de nourriture, d’eau et de lumière pour la photosynthèse permettant la synthèse du carbone base vitale de la plante. En limitant un de ces éléments, elle aura du mal à se développer. D’où l’intérêt de pailler le sol autour des plantes ornementales ou potagères pour éviter la croissance des mauvaises herbes : le paillage agissant comme une couverture, il ne laisse pas passer la lumière donc pas de croissance des plantules.

Autre avantage, cette couverture limite l’évaporation de l’eau du sol et permet de maintenir une certaine humidité au pied des plantes. Elle évite l’érosion et le ruissellement des eaux de pluies, facilitant leur pénétration dans le sol.

En matière de biodiversité, le paillage sert de refuge et de nourriture à de nombreux prédateurs et alliés utiles comme les oiseaux, les hérissons, les vers de terre, les micro-organismes. Attention cependant pour le potager en veillant à ce que le paillage ne favorise pas le développement des limaces en période d’humidité.

Le paillage peut être épandu à tout moment. L’idéal est de l’appliquer lors du démarrage de la végétation.

 

Les matériaux utilisés pour le paillage sont nombreux mais chacun a ses avantages et ses inconvénients et ne convient pas à toutes les plantes.

 


Les paillis d’origine végétale

 

Foin, paille et feuilles

Le reste de tontes d’herbe ou de gazon est de loin le matériau le plus utilisé car présent dans la plupart des jardins et gratuit. Il est recommandé de le laisser sécher et de l’apporter sous forme de foin au pied des plantes. Si l’on utilise du gazon fraichement tondu, il risque de se minéraliser très rapidement et d’être la source de maladies cryptogamiques. La tonte aura été réalisée avant la montée à graines de l’herbe afin d’éviter qu’elles ne se ressèment.

La paille est aussi une bonne solution, avec une dégradation plus lente que le gazon. Elle permet de protéger du contact avec la terre les fraises ou certains légumes comme courges, courgettes.

Après avoir rempli son rôle de couverture en saison de végétation, le paillage de gazon ou de paille sera incorporé au sol par binage après l’hiver afin de favoriser sa minéralisation et sa transformation en humus. A l’automne, il peut être complété par une nouvelle couche afin de protéger les plantes sensibles au froid, telle une couverture.

Les fougères broyées séchées peuvent constituer un excellent paillage. Certains soulignent leurs capacités antifongiques, vertus intéressantes pour les fraisiers, et de répulsion des limaces.

Les feuilles mortes, si elles ne sont pas utilisées dans le compost, pourront être mises de côté pour constituer un paillage au printemps. Attention à celles minéralisables lentement comme celles de platane qui pourront être un inconvénient lors de l’incorporation dans le sol. Il est conseillé de les broyer avant leur utilisation comme paillis.


 
 
Paillettes de lin

Les paillettes de lin, malgré leur coût, ont l’avantage d’être esthétiques et d’avoir une bonne capacité de rétention de l’eau. Elles peuvent être utilisées pour les massifs de fleurs et les zones sensibles à la sécheresse.

 

Branchages broyés

Les branchages broyés, parfois appelés BRF (bois raméal fragmenté), sont de plus en plus utilisés, du fait notamment du développement du nombre de broyeurs tant dans les entreprises que chez les particuliers. Vous pouvez utiliser les branchages que vous avez coupés dans votre jardin, donc un bon moyen de vous en débarrasser sans avoir à les incinérer ou les porter à la déchetterie, à condition d’avoir accès à un broyeur (ce peut être un investissement entre voisins…). Certaines municipalités proposent aussi des BRF aux particuliers. Les BRF ne se dégradant que très lentement, ils resteront longtemps sur le sol et sont à réserver aux plantes pérennes et vivaces. Attention aux broyats de branches feuillées de Thuya et autres cupressacées contenant des terpènes, substances toxiques pour les plantes, et surtout aux copeaux et sciures de chêne ou de châtaigner, qui contiennent des tannins.

 

Ecorces d’arbres

Les écorces de pin sont utilisables pour les plantes pérennes car restent longtemps en place, donc difficilement gérables dans un potager où l’on retourne la terre chaque année. Une rumeur tenace leur attribuerait la propriété d’acidifier le sol. Des essais scientifiques en cours semblent contredire ces affirmations.

 

En général, pour le paillage végétal, il est conseillé d’apporter une couche d’environ 7 à 10 cm d’épaisseur. Le choix sera aussi conditionné par sa résistance au vent dans les régions sujettes aux rafales !

 

 

Le paillis minéral et synthétique

Les produits minéraux comme les billes d’argile, la pouzzolane, voire les galets, graviers ou déchets d’ardoise sont très efficaces. Certains sont onéreux mais sont d’un indéniable effet esthétique. Ils sont plutôt utilisés pour les rocailles, les pots, bacs ou jardinières. Les toiles ou bâches, sont surtout utilisées dans les espaces verts, notamment pour les arbres et arbustes, sont très efficaces mais peu esthétiques. Il est possible de recouvrir ces toiles d’une surcouche plus esthétique comme des écorces de pin ou autres mais entraînant des surcoûts.

 

Des règles de bon sens

Les choix de paillis sont donc très variés permettant de les adapter à tous types de végétaux et de jardins. A priori, tout type de matériau peut être  utilisé à condition qu’il ne soit pas polluant. Lors de l’installation, penser aussi à comment le récupérer si un jour on désire s’en débarrasser. C'est le cas des paillis d'origine minérale que l’on ne peut pas enfouir. Pour les massifs de plantes vivaces, paillez lorsqu’elles sont développées afin de repérer la base des tiges que vous baliserez avant le repos de végétation, par exemple avec des fiches en bois. Le but est que le paillis ne recouvre pas la base des plantes pour leur permettre de redémarrer au printemps.

L’aspect esthétique est aussi un critère, entre un aspect gris bleuté d’une ardoise, un rouge des écorces de pin ou un blanc écru des paillettes de lin, le jardinier pourra trouver une harmonie avec ses végétaux.

Dernier conseil : ne négligez pas, avant de pailler, de nettoyer le sol, de le biner et d’arracher les mauvaises herbes. C’est une des conditions de réussite !