Les panicauts, des chardons qui n’en sont pas : 1ère partie les panicauts spontanés en France

Claude Denninger

Punaises rayées des ombellifères sur Eryngium giganteum
Punaises rayées des ombellifères sur Eryngium giganteum – © D.R.

On dirait des chardons, avec leurs bractées épineuses et leurs fleurs réunies en capitules. Pourtant ce ne sont pas des Astéracées, comme les vrais chardons. D’ailleurs les belles punaises rayées des Ombellifères (du genre Graphosoma) qui ne se nourrissent que sur les plantes de cette famille, ne s’y trompent pas.

Botanique

Les panicauts, genre Eryngium (de leur nom grec eruggion), comprennent environ 200 espèces réparties sur l’Europe, l’Asie, l’Afrique du Nord et le continent Américain. Ce sont des plantes bisannuelles ou vivaces, ces dernières étant plus nombreuses et les plus appréciées pour les jardins. Les feuilles de la base peuvent être simples et entières, très différentes des feuilles caulinaires et des bractées ou être, comme celles-ci, profondément divisées et épineuses.

Les fleurs sont groupées en capitules globuleux ou ovoïdes. Ceux-ci, sont entourés de bractées, toujours épineuses, formant un involucre qui donne son principal attrait à l’inflorescence. Dans la nature, les panicauts colonisent des milieux très variés, du sable des dunes jusque dans les montagnes, en passant par les prés et les talus. Dans les jardins de rocailles, ils peuvent être plantés en sujets isolés ou par groupes de 3 ou 5. Ils constituent des éléments pittoresques mais de plus ou moins grande taille (50 à 80 cm), bien différents des plantes naines ou tapissantes. Il convient donc de bien choisir leur emplacement.

Les panicauts trouvent aussi leur place, dans les plates-bandes herbacées où ils peuvent être associés à diverses plantes telles que Coreopsis, Eschscholtzia, Gypsophiles, Graminées, Rudbeckia, …

Toutes les espèces représentent aussi d’excellentes fleurs à couper pour bouquets secs, à condition de les cueillir dès le début de leur floraison.

Sols profonds et drainés

Étant tous des plantes à puissante racine pivotante, les panicauts ne peuvent croître que dans des sols profonds. Ils exigent aussi qu’ils soient parfaitement drainés mais ils acceptent des sols maigres ou même constitués principalement de sable et de gravier, voire des pierrailles avec un peu d’humus. La plupart supporte bien la sécheresse.

En raison de leur système racinaire, ils ne peuvent être transplantés facilement qu’à l’état de très jeunes plants. Ils convient donc de les multiplier par semis, effectués en pots suffisamment profonds dès l’automne car les graines ne germent, au printemps, qu’après avoir subi une période de froid et même de gel de plusieurs semaines.

Les espèces spontanées en France

Les espèces spontanées en France sont toutes rustiques et peuvent être introduites dans nos jardins.

Le panicaut des champs

Le panicaut des champs (E. campestre), généralement considéré comme une mauvaise herbe, ce panicaut n’est cependant pas totalement dépourvu d’attrait. Dans un grand jardin on peut en tolérer quelques plants.

Certes, toute la partie aérienne, feuilles et inflorescences, est très épineuse et peu colorée. Mais, souvent aussi large que haute (20 à 50 cm) à la floraison, elle offre un aspect pittoresque bien particulier. Ce panicaut ne demande aucun entretien.

Dans la nature, il est largement répandu dans tout le sud et le centre de l’Europe, jusqu’à 1000 m d’altitude et même au Danemark mais à l’état de plante rare. Il colonise particulièrement les prairies sèches, les talus, le bord des chemins, surtout sur des sols calcaires.

Le panicaut des Alpes - © Kriss Nature
Le panicaut des Alpes – © Kriss Nature

Il fleurit de juillet à septembre. En automne toute la partie aérienne se dessèche. Lors d’une tempête, le vent entraîne la plante plus ou moins globuleuse, la fait rouler sur le sol, favorisant ainsi la dissémination des graines, d’où le nom de chardon roulant, déformé en chardon Roland, couramment donné à cette plante.

 

Le panicaut des Alpes

Après le plus commun et le moins attrayant, voici le panicaut des Alpes, l’un des plus rare et le plus beau des panicauts. Il est surtout connu sous le nom de chardon bleu des Alpes, de chardon bleu tout court (mais ce nom prête alors à confusion avec l’Echinops ritro ou boule azurée) ou encore de Reine des Alpes, nom justifié par sa taille et sa beauté.

A l’état spontané, il croît, à l’étage subalpin, entre 1 500 et 2 300 m d’altitude, dans une grande partie des Alpes occidentales, ainsi que dans le Jura où il est très rare. On le trouve dans les massifs calcaires mais, presque partout, de façon très localisée. Les stations les plus importantes et les plus connues sont en Vanoise. Cette espèce est strictement protégée.

Les feuilles de la base sont cordiformes, entières, bien pétiolées, vertes, à bords seulement dentés. Celles de la tige sont vert bleuté, divisées, légèrement épineuses. Seules les bractées de l’involucre, deviennent vraiment bleues, d’un beau bleu métallique brillant.

La floraison se produit en août. Il est fréquemment planté près des chalets, des hôtels, de certains refuges, entre 800 et 2.000 m d’altitude où sa culture ne présente aucune difficulté et où il s’accommode même de sols siliceux.

En plaine, ce magnifique panicaut se comporte beaucoup moins bien. Il ne survit souvent que 3 ou 4 ans. Placé de façon à être au soleil le matin et plus ou moins à l’ombre l’après-midi, il peut mieux résister aux étés très chauds.

 Le panicaut épine blanche

Le panicaut épine blanche (E. spinalba) nous offre des inflorescences presque aussi élégantes, par leur forme, que celles du chardon bleu des Alpes mais elles sont toujours d’un blanc argenté brillant, parfois un peu teinté de vert et sont plus épineuses. Les feuilles sont bien différentes, très épineuses, elles ressemblent à celles du panicaut des champs.

Dans la nature, ce panicaut se trouve dans certains massifs calcaires des Alpes et des Préalpes du sud, sur des pentes rocheuses ou dans des éboulis, entre 1 400 et 1 800 m d’altitude. C’est aussi une espèce rare et protégée, présente notamment au Mont Ventoux, où elle est même abondante.

Le panicaut de Bourgat présente des feuilles profondément divisées - © Kriss Nature
Le panicaut de Bourgat présente des feuilles profondément divisées – © Kriss Nature

Ce panicaut est bisannuel ou pluriannuel mais alors monocarpique. Il meurt toujours après avoir fleuri et dispersé ses graines. Sa hauteur est modeste : 20 à 40 cm seulement. En culture, il faut toujours le laisser produire des semis ou en récolter des graines.

Le panicaut de Bourgat

 Le panicaut de Bourgat (E. bourgati) est le chardon bleu des Pyrénées. Il ne possède pas l’élégance de celui des Alpes mais il est, lui aussi, vraiment bleu lorsqu’il fleurit.

Endémique des Pyrénées, c’est une plante vivace, même dans les jardins. Il croît surtout entre 1.000 et 2.000 m d’altitude mais se cultive assez facilement en plaine.

Toutes ses feuilles sont raides, coriaces, profondément divisées, épineuses, plus ou moins glauques.

Panicaut maritime © Hélène Gallo – Notre planète info
Panicaut maritime © Hélène Gallo – Notre planète info
Le panicaut maritime

Le panicaut maritime (E. maritimum) croît sur les plages et sur les dunes du littoral, ce qui justifie parfaitement ses noms communs de panicaut de mer et de panicaut marin. Il est présent, mais en régression, sur presque toutes les côtes sableuses encore naturelles d’Europe, d’Afrique du Nord et du Proche Orient.

C’est une belle espèce vivace, aux feuilles et aux inflorescences épineuses, toutes très glauques et décoratives. Dans nos jardins, il convient de la cultiver, à une exposition ensoleillée, dans du sable additionné seulement d’un peu de terreau.

Pour en savoir plus sur les Eryngium européens et asiatiques (E. giganteum, E.planum, E. coeruleum, E. amethystinum, E. tricuspidatum et sa variété à nervure blanche) voir la 2ème partie dans le prochain numéro de Jardins de France, ainsi que sur les Eryngium américains, Pour plus d’informations sur toutes ces espèces on se reportera avec bonheur à l’article de Claude Denninger paru dans le Lyon Horticole N°690 d’avril 2016.

 

> Télécharger le PDF