Gazon : mode d'emploi…

Hervé Eric Cochard

Le choix des graminées et du mélange est la première étape qui conditionne la réussite de la réalisation d’une pelouse, sans oublier le type de sol, le climat, l’usage ou le choix d’entretien… Implanter une pelouse, ce n’est pas sorcier ! Voici quand et comment semer ou encore comment régénérer les surfaces enherbées…

- © GNIS Hervé Eric Cochard

Un beau gazon fait rêver, et de nombreux jardiniers sont prêts à tout, même à fournir de très grands efforts pour obtenir une pelouse parfaite, malgré les contraintes d’implantation parfois difficiles, liées au type de sol ou encore au climat.
Espèces pionnières, les graminées s’adaptent à la plupart des sols, se contentent de peu, mais leur installation est d’autant plus rapide et durable que le sol est fertile et profond. Les terres légères, superficielles, ou trop compactées ont de faibles réserves en eau et, en l’absence d’arrosage, il sera difficile de conserver sa pelouse. Or, les fétuques, surtout les fétuques élevées, sont des espèces résistantes à une sécheresse prolongée, contrairement aux ray-grass anglais et à la fétuque rouge traçante (cf tableau).
 

Quelle pelouse pour quel climat ?

La France comporte autant de terroirs potentiels que de jardins, mais les graminées utilisées résistent toutes à la chaleur. Le sec, lié au manque de réserves, cause le plus de dégâts aux pelouses. Quant au froid, il n’a jamais tué de gazon, mais en montagne et sous un climat frais, on préfèrera des fétuques rouges gazonnantes aux ray-grass anglais ou aux fétuques élevées qui font triste mine si l’hiver se prolonge.
Dans les situations les plus méridionales et en bord de mer, les cynodons (chiendents), seuls ou associés à des fétuques, ont les meilleures capacités de résistance à la sécheresse, à la chaleur et au sel. Le seul bémol : leur dormance hivernale.
 

Quel usage ?

L’usage prime sur la plupart des critères, sans ignorer les paramètres pédoclimatiques, l’utilisation et le type d’entretien envisagé, critères tout aussi importants. Le piétinement et la résistance à la sécheresse, en premier lieu, mais aussi le type d’entretien : possibilités d’arroser, fréquence des tontes… De fait, les grands types de mélanges gazons sont établis en fonction de leur principal usage. Seuls les gazons labélisés obéissent à des pourcentages spécifiques, pour chaque catégorie, avec des performances variétales bien encadrées. Les fabricants de gazon ont adopté leur propre dénomination, mais finalement on trouve trois grandes catégories avec des sous-rubriques.



L’agrément

C’est le gazon type, pour jardin d’amateur et parcs privés ou publics. Ce gazon est piétiné, il doit être facile à entretenir, facile à vivre avec peu d’exigences d’entretien et une bonne pérennité. Les ray-grass anglais sont incontournables, mais accompagnés d’une majorité de fétuques. On privilégiera les fétuques élevées si la résistance au sec et la solidité sont deux critères essentiels (terres séchantes, zone sud de la France) et les fétuques rouges pour des zones plus fraîches et océaniques.
Un gazon destiné à la zone sud se compose de fétuques élevées (50-60%), de ray-grass anglais (30%) et de fétuques rouges (10-20%). Dans les compositions destinées aux zones plus fraîches, l’on retrouve le ray-grass anglais (30-50%), les fétuques rouges gazonnantes (20%), la fétuque ½ traçante (15%) et les fétuques traçantes (15%).

 

Les gazons d'ombre  comprennent une majorité de petites Fétuques © Clive NicholsL'ornement

Les critères esthétiques prennent le pas. L’entretien est optimisé : arrosage automatique, tontes fréquentes et de qualité (hélicoïdales), fumures régulières, désherbages… Les ray-grass anglais les plus fins ont leur place ; associés à de fines fétuques rouges gazonnantes et ½ traçantes. Ceux qui tondent plus ras avec une tondeuse hélicoïdale peuvent envisager le velours d’un tapis d’agrostides à l’instar de celui des golfs. Les exigences sont importantes.
Certains gazons d’ornement, riches en petites fétuques (rouges traçantes et gazonnantes, ou durettes) ne sont pas forcément plus fragiles que des gazons d’agrément, c’est finalement l’intensité des soins qui est plus poussée. Une pelouse bien entretenue et fertilisée se régénère facilement.

 

 

 

Pour le sport

La résistance au piétinement est le premier critère ainsi que la solidité et la capacité de récupération. Ces gazons ont tous une forte proportion de ray-grass anglais. Le reste, de 40 à 60%, est composé de fétuques élevées si le manque d’eau est de rigueur, ou/et de pâturins des prés. Les fétuques rouges accompagnent ces espèces. La désignation « soleil » ou « sud » figure sur beaucoup de marques, afin d’évoquer la résistance au sec du gazon, qu’il soit de sport ou d’agrément.

- © GNIS Hervé Eric Cochard

Rustique ou pas ?

Dans l’imaginaire, rustique est synonyme de gazon solide et facile. Cette dénomination est parfois trompeuse, car certains rustiques sont simplement des gazons d’entrée de gamme avec du ray-grass anglais banal, et de la fétuque traçante, la moins intéressante des fétuques.
De tels gazons sont rarement vraiment rustiques. Le vrai gazon rustique est un gazon d’agrément qui s’adapte partout, il résiste au piétinement et au sec. En bref, il dure longtemps et il s’entretient facilement. Par exemple, un gazon d’agrément label rouge est, à l’usage, un vrai « rustique ».

 

Quand et que semer ?

Il est conseillé d’installer sa pelouse sur un sol réchauffé, à partir du mois d’avril. Les semis de fin de printemps fonctionnent bien, mais il y a deux inconvénients majeurs : d’abord, on s’expose à de fortes levées de mauvaises herbes si le sol est pollué, surtout que certaines espèces sont incontrôlables (digitaires…), et ensuite, il y a le risque de ne pas avoir la pelouse bien installée avant les stress de l’été. Un gazon de fétuques élevées ne devient résistant au sec qu’après plusieurs mois de cultures (une saison). Les meilleures périodes de semis se situent en fin d’été : de fin août à fin septembre (octobre dans le sud). Le sol est encore chaud et la pluviométrie redevient favorable.
Les professionnels sèment toute l’année en évitant les grands froids (de décembre à février), mais ils disposent de préparateurs de sols, et de semoirs, ce qui permet d’enfouir régulièrement la semence. Ils maîtrisent aussi l’arrosage (automatique). Les ray-grass anglais sont les champions de l’installation, on peut les voir pointer en moins d’une semaine. La facilité d’installation est d’ailleurs l’une des raisons de leur popularité, en plus d’une excellente résistance au piétinement. Si leur proportion dans le mélange n’est pas trop forte, ils protègent, sans les étouffer, les autres espèces qui terminent leur installation à l’abri.
Quant aux fétuques rouges et élevées, elles s’installent assez bien, mais elles demanderont 2 fois plus de temps. Les pâturins, les fétuques durettes ou les canches sont plus lentes. Le mélange permet d’amortir ces écarts, mais si on veut profiter des performances des espèces plus lentes à installer (petites fétuques), encore faut-il leur laisser du temps avant d’utiliser sa pelouse. Les espèces délicates à installer sont plus exigeantes en température, et le sol doit être très finement préparé pour accueillir des semences fines comme les pâturins, les canches ou les agrostides.

Regarnissages

Comme sur les stades, il s’agit de réparer des zones dégarnies. La vitesse d’implantation et la résistance au piétinement priment. Ces gazons renferment 100% de ray-grass anglais, en général 3 variétés, toutes doivent posséder les meilleures performances en termes de solidité, et de densité, le gage d’une bonne récupération.

 

 


Comment semer ?

Les préparations de sol permettent de modeler et d’égaliser le terrain. Les labours profonds ne sont pas conseillés, on risque de diluer les couches superficielles plus riches. Les terres rapportées seront bien égalisées et nettoyées des cailloux et débris les plus grossiers. On conserve de la terre fine en surface, mais le sol est ferme et rappuyé. Au besoin, on fera un premier roulage avant le semis.

Caractéristiques et exigences des espèces : d'importantes différences variétales existent au sein d'une même espèce

Régénérer une vielle pelouse

Lorsque le sol conserve une planimétrie acceptable, il ne faut jamais tout retourner, car la fertilité du sol d’une vielle pelouse réside en surface. Il suffira de défeutrer et scarifier. On peut aussi, au préalable, brûler son ancienne pelouse, surtout lorsqu’elle est envahie de plantes vivaces gênantes (le Glyphosate, désherbant foliaire systémique est sans rémanence). Dans ce cas, 8-10 jours après le traitement, on va défeutrer et semer directement le mélange adapté. Une fumure de démarrage facilite l’installation (40 g/m d’un engrais longue durée, organique ou enrobé). Doses de semis recommandées : 30-40 g/m, soit 3-4 kg par 100 m.
Pour les gazons riches en fétuques élevées, on se situera dans le haut de cette fourchette.
Les gazons d’agréments ou de sports comportent en moyenne 800 graines/gramme de semence. Un semis de 30 g/m représente 24 000 graines au mètre soit 2 plantes au cm ! Il y a largement de quoi assurer une rapide couverture.


Un semis trop épais ne sert à rien. Les graines sont enfouies à 5-10 mm, et recouvertes de terres fines. Le sol est alors roulé pour assurer un contact étroit entre les enveloppes des semences et l’humidité du sol. La levée commence lorsque le lit de semence est maintenu humide plusieurs jours.

 Levée de gazon - © Hervé Eric Cochard

2 thoughts on “Gazon : mode d'emploi…”

  1. Pourriez-vous me dire s’il faut arroser le semis d’une pelouse juste
    après son épandage réalisé cette semaine dans le Sud-ouest ?

    Merci pour votre réponse.
    Cordialement
    Mme Tréguer

  2. Bonjour. Nous venons d’emménager à 1200m d’altitude dans son les Hautes Alpes en PACA. Si nous avons bien compris il nous faut planter du fetuque rouge. Mais à quelle période ? Le sol est plein de pierres existe t’il une machine qui pourrait en enlever une bonne partie à la surface ? Merci beaucoup pour tous vos précieux conseils.

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