François Tesnier

Daniel Lejeune

A travers le très beau texte de Désiré Bois, nous vous avons présenté récemment le grand bibliothécaire de la SNHF que fut Georges Gibault. Or la postérité doit aussi retenir la personnalité attachante et la grande érudition de son bibliothécaire-adjoint durant de nombreuses  années : François Tesnier qui, à l’exemple d’un G. Le Nôtre[1], érudit et historien autodidacte (1855-1935) s’intéressa à la « petite histoire de l’Horticulture ».
 

Par une amusante coquetterie, cet authentique ancien jardinier signa ses travaux d’un docte « Le Texnier ». Le 5 février 1825, Lucien Chaure, alors directeur du Moniteur d’Horticulture, s’exprimait ainsi, au nom de la SNHF[2] :

 

« Mon cher collègue, mon cher collaborateur, mon cher ami devrais-je dire, au nom de la Société Nationale d'Horticulture de France, et comme Président de la Commission de rédaction, m'échoit le douloureux devoir de t'adresser un dernier adieu ! Fils de ses oeuvres, François Tesnier, né à Paris, le 16  février 1892, débuta dans la vie comme jardinier, puis, après son mariage, le 26  août 1878,  succéda à son père, horticulteur, 74 rue des Cévennes, à Paris, et exploita cet établissement jusqu'en 1902,  faisant, la bêche en main, surgir de la belle terre de France, notre mère nourricière, ces admirables fleurs qui font honneur à l'Horticulture parisienne, et qui, dans de douloureuses circonstances, comme aujourd'hui, viennent, avec nos regrets, exprimer notre chagrin à celui qui nous quitte à jamais. Malheureux celui qui part sans que la moindre fleur du souvenir vienne orner son cercueil ! Membre de notre Société depuis 1880,  Tesnier avait eu l'intelligence de s'assurer une distraction pour occuper les loisirs de sa retraite. Bibliophile par goût, il quitta la bêche et la remplaça par la plume, puis s'adonna à la lecture de la littérature horticole, ce qui le fit apprécier de ses collègues qui lui confièrent le poste de bibliothécaire adjoint, fonctions qu'il remplit à la satisfaction de tous pendant près de 20  ans, jusqu'au jour où la mort cruelle vint l'arracher à ses travaux. Nombreux sont les sociétaires à qui il rendit service en facilitant leurs recherches, et ce, avec la plus grande complaisance. De ses qualités personnelles, bonté, labeur, patience et affabilité , je n'ai rien à ajouter à ce que pensent de lui ceux qui ont été à même de l'approcher. D'une extrême compétence en bibliographie horticole, il savait où trouver les renseignements que ses collègues avaient vainement cherchés, aussi était-il devenu l'ami de tous ceux qui fréquentent notre belle bibliothèque horticole trop peu connue. Ce n'était pas qu'un érudit, c'était aussi un savant et un littérateur, car il a donné une large collaboration aux périodiques horticoles, tels que Le Moniteur d'Horticulture, La Revue Horticole, Le Petit Jardin, etc., par de savantes et agréables notices biographiques sur les anciens horticulteurs et botanistes, travaux dignes des meilleurs auteurs, puis, sous le titre : Essais sur l'histoire de quelques fleurs d'ornement, il rechercha et décrivit les origines des : Dahlia, Œillet, Giroflée, Pâquerette, Canna, Anémone, Violette, etc., en suivant pas à pas les transformations subies par ces fleurs jusqu'à nos jours, les noms des obtenteurs des différentes variétés, les dates de mise au commerce, etc.

Véritable travail de bénédictin, car il lui a fallu consulter tous les vieux livres pour en extraire ces renseignements si précieux pour l'histoire de l'horticulture. Ces intéressants travaux lui firent obtenir les Palmes académiques.

Membre aussi de la Commission de rédaction du Journal  de notre Société, ses sages avis étaient largement appréciés.

Ici je m'arrête — trop ému — car je ne veux pas oublier les douloureuses épreuves subies par François Tesnier, épreuves qui cependant n'avaient pas altéré son caractère, car comme bien d'autres malheureux pères il a largement payé sa dette à la Patrie par la perte de ses trois fils : Charles, Pierre, René, morts au champ d'honneur, à Vaux, à Fontaine-les-Capy, à Yonck, ce qui lui porta un coup cruel. Si son âme immortelle plane, en ce moment, au-dessus de nous, elle pourra juger de l'étendue de la première peine qu'il cause à ses amis par sa mort si brutale. Puisse sa famille trouver dans les sympathies et les regrets de toutes les personnes présentes un adoucissement à son inconsolable chagrin. Adieu Tesnier, ton souvenir restera gravé en nos coeurs et la Société Nationale d'Horticulture de France te regrettera toujours pour les inappréciables services que tu lui as rendus. »

 

Tout comme Georges Gibault, François Tesnier a ainsi publié le fruit de ses recherches dans plusieurs revues de premier plan. Une partie de ses articles a également fait l’objet de tirés-à-part édités par la Librairie horticole, siégeant au 84 bis de la rue de Grenelle, sous l’impulsion d’Henri Martinet, directeur des revues Le Jardin et Le Petit Jardin.
 

 

Le Texnier, Essais sur l'histoire de quelques fleurs d'ornement. L'ŒilletLe Texnier, Notices sur les jardiniers célèbres et les amateurs de jardins. Van Houtte (Louis)

 

Au fil de nos lectures, nous avons retrouvé
 

Au Moniteur d’Horticulture :

1910 p 10, 23, 35, 47, 81, 95, 154, 167, 190 : Le Camellia
1911 p 152, 162 : Le Réséda ; p 214, 222,2 34, 267, 281 : La Reine-Marguerite
1912 p 82, 95, 102, 129,1 41,1 52 : La Giroflée
1913 p 94, 106, 114, 139 : La Violette ; p 166, 173, 189, 203, 215, 227 : La Pensée
1914 p 88,104 : L’Anémone

 

Chez F. Salvetti

1906 : “Un protecteur du jardinage : Sir Joseph Banks”
 

Dans le Journal des Roses :

Notice sur Joséphine de Beauharnais et la Malmaison dans le Journal des Roses (N° 35-36)
 

Dans le Petit Jardin :

1906 p 58 : La Giroflée ; p 85 : La Giroflée jaune ; p 128 : Le Mimule, p 205 : Le Réséda ; p 284 : Le Muflier
; p 254, 264 : La Reine-Marguerite ; p 332 : l’Anthémis ; p 435 : La Tubéreuse ; p 508 : La Rose de Noël
1907 p 84,94,105 l: a Jacinthe ; p 94, 145,154,178,185,194 : La Tulipe ; p 304 :  Le Pois de senteur
1908 p 124 : Le Muguet ; p 205, 214, 224, 234, 254, 264, 285, 294, 305, 315 : Le Bégonia ; p 414, 425, 433, 445 : Le Dahlia
1910 p 44 : Les débuts du Chrysanthème en France
1911 p 26 : Histoire de la culture du Chrysanthème en France (suite) p 25
 

A la Librairie Horticole :

Monographies végétales : 1908 : L’Œillet, Le Fuchsia Le Canna ; 1909 : Le Dahlia ; 1911 : Le Camellia ;
Notices sur les jardiniers  célèbres et les amateurs de jardins, 1909 :  Pierre Tamponnet, Claude Fion, Nicolas Lemon ; Les Cels ; 1911 : Louis Van Houtte ; sans date : Etienne Soulange-Bodin, Joseph Sabine, André-Philippe Pelé


A la librairie Montparnasse

1908 La Paquerette


Dans la Revue Horticole

1909 p 408 : Le Cyclamen 1909
Que de pépites à savourer dans les trésors de notre bibliohèque et à consommer sans modération dès que possible !



[1] G. Lenôtre, de son vrai nom Louis Théodore Gosselin, s’est en effet intéressé à la « petite histoire » de la période révolutionnaire, dont il a rassemblé de savoureux tableaux dans la série maintes fois rééditée « Vieilles maisons, vieux papiers ».

[2] Journal de la SNHF, 1925, p 92.